Affaire sensible : Violine Morrette

Description

Aspect :

Violice, avant son arrivée dans l’Esquisse, était une femme âgée d’une cinquantaine d’année, petite mais particulièrement musclée, du fait d’une vie tournée autour du sport et de l’aventure, le plus souvent mafieuse. Elle portait les cheveux courts, s’habillait en survêtement lorsqu’elle était en mission et en costume le reste du temps.

A son arrivée dans l’Esquisse, Violice se réveilla dans un corps bien différent. Désormais élancée et fine, son corps affichait l’équilibre rare du sportif et du pulpeux, tel qu’aurait pu le rêver le regard masculin le plus libidineux. De plus pour une raison inconnue, si ce n’est le désir du mystérieux créateur de ce monde, seules les tenues les plus légères et correspondant aux standards classiques de ce que l’hétérosexualité occidentale entend par « bandant », lui allaient. Il y avait toutefois un toutefois : sa tête avait été remplacée par une bombe. Une bombe de belle taille par ailleurs et qui malgré l’absence de globes oculaires, d’oreilles, de nez ou de bouche, ne l’empêchait absolument pas de voir, entendre, respirer, sentir ou parler. En revanche, elle n’avait nullement besoin de se nourrir. Etonnant, non ?

Caractère :

Sûre d’elle, le verbe haut, le poing bien placé (souvent dans la gueule), Violice a appris très jeune à ne pas se laisser faire et à affirmer ses idées. Intrépide, elle aime le risque, particulièrement lorsqu’il peut rapporter gros. Loin d’être une simple brute cupide, Violice apprécie aussi les belles choses, un morceau de piano, une balade près d’une rivière, le sourire mutin d’une première lors d’un bal.

Elle est toutefois impitoyable si l’on empêche d’une manière ou d’une autre de suivre la voie qu’elle a décidé d’emprunter.

Avant l’esquisse :

Violice a mené plusieurs vies et il est difficile d’avoir des certitudes sur la moindre d’entre elles.
Elle serait née au début des années 60 au cœur du sixième arrondissement parisien au sein d’une famille bourgeoise d’héritage aristocratique. Du fait de parents peu présents, elle passe la majeure partie de sa jeunesse dans un cossu établissement privé protestant où l’on insiste, fait singulier, sur la pratique sportive.

Elle s’épanouit d’ailleurs au travers de celle-ci qui lui permet de mieux accepter ses bras naturellement puissants et ses épaules larges. Elle excelle en particulier à la boxe, terrassant aisément ses condisciples masculins.

A la sortie de l’école, Violice devient mécanicienne, continue de pratiquer de multiples sports – boxe, lancer de poids, natation, course automobile – et représente même la France à plusieurs reprises. Elle affirme dans le même temps ses choix de vie allant de l’esthétique, elle s’habille toujours avec d’élégants costumes masculins ou de sobres tenues sportives, au monde du travail, elle passe de mécanicienne, à représentante de commerce, en passant par conductrice d’engin, garde du corps ou encore tenancière de bar ou encore dans sa vie sentimentale, s’affirmant ouvertement comme lesbienne.

 Véritable personnage parisien, cette célébrité a aussi sa part d’ombre, ainsi Violine est régulièrement l’objet d’attaques, de manipulations médiatiques éhontées et de coups bas commerciaux.

Aussi forte puisse-t-elle être, elle est solide mais pas invincible et finit par quitter Paris pendant plusieurs années. Cette partie de son histoire demeure plutôt mystérieuse. Paradoxalement l’une des hypothèses les plus solides et aussi l’une des plus absurdes. Violice aurait en effet exercé une activité de chanteuse lyrique au sein d’un cabaret moscovite. Difficile à imaginer et pourtant cette russophilie réapparait bien vite.

 A la fin des années 90, Violice réapparait à Paris mais sa célébrité, si elle existe toujours, a bien changé. Personnalité bien plus trouble, elle ne multiplie plus les coups d’éclat et se fait plus discrète. Mécène, elle est toujours présente dans les lieux de pouvoir, mais l’origine de sa fortune et de son réseau soulève bien des interrogations.

C’est à cette période que sa légende noire se forme. Tour à tour, on la relie aux conflits dans les Balkans, à l’instabilité du Moyen-Orient, à toutes sortes de trafics, tantôt la drogue, tantôt les femmes … Son rôle lui aussi possède bien des formes. Organisatrice logistique, gérante économique, agent de terrain avec un goût certain pour la torture …  Dire qui était et jusqu’où pouvait aller madame Morette représentait un inquiétant mystère.  
L’esquisse au présent :

A son arrivée dans l’esquisse, il a fallu bien entendu accepter ce changement physique et tout ce qui l’impliquait. Ce ne fut pas longtemps un problème. Ce corps était plus efficace encore que le précédent lorsqu’il s’agissait de se faire respecter. Violice espérait simplement que les coups de boule qu’elle employait généreusement ne finirait pas par lui faire perdre sa propre tête.

Elle avait tout de même eu peur au début de la solitude. En effet, il n’était pas évident de faire accepter un tel faciès à l’autre. Elle eut rapidement l’heureuse surprise de découvrir que dans un tel monde, elle subissait finalement moins l’altérité que celle qu’elle avait reçue sur Terre.

Plus important encore, elle fut enchantée de découvrir toutes les promesses qui s’offraient à un esprit audacieux et à la fibre commerçante ici. Son franc parler et son front métallique lui permirent d’être acceptée avec une singulière célérité au sein du SOC et d’obtenir un emplacement bien en vue dans le quartier du centre. Elle n’eut pas de mal ensuite à nouer des liens avec plusieurs membres de la compagnie des explorateurs ainsi qu’avec certains sorteurs avec qui à défaut de partager le goût de la réussite économique, elle partageait celui de l’aventure.

Le début de sa réussite commerciale lui permit aussi de développer une amitié fructueuse avec quelques cadres des hussards d’azur ainsi qu’avec des emplumés gradés des magendarmes. L’amitié est importante lorsqu’elle est utile après tout.

Globalement, Violice avait su tisser des liens avec toutes les organisations de ce jeune monde, quand bien même elles s’opposaient, à l’exception des hippies abrutis du quartier Vert. Enfin, le manque de protéines les rendait de toute façon particulièrement réceptif à la baffe dans la gueule.

Aujourd’hui, le quotidien de Violine se résume donc à traiter les demandes de ses clients, trouver des sous-traitants capables – ce qui n’est pas toujours simple – et d’employer ses gains pour faire évoluer la ville dans la bonne direction. La sienne donc.

Alizé, une entreprise jeune et prospère

 Violice était dans l’esquisse depuis seulement quelques heures. Elle errait naturellement perdue et pour l’une des premières fois de sa vie, également éperdue.

  Elle fit alors la rencontre de Pétronille, une jeune femme arrivée quelques semaines plus tôt et déjà bien acclimatée. Elle vivait dans un joli campement, qui bien que rustique, ne manquait pas d’élégances avec les différentes fleurs qui le recouvrait. Pétronille l’amena ensuite en ville, la ville, comme Violice l’apprit rapidement, et lui présenta ses ami(e) du quartier vert. Elle les détesta tous très rapidement.

  Cette visite lui permit tout de même de mieux cerner le potentiel de ce nouveau monde. Tout y était inquiétant et à construire dans le même temps. Ce n’était pas si différent de son arrivée en Russie finalement.

Sa première conquête reposa sur ce qu’elle nommât : les abeilles bonne-maman. Ce n’était pas vraiment des abeilles, ni des pots de confiture Bonne Maman. On aurait plutôt dit de gros bousiers volants tombés dans un pot de paillettes. Enfin, l’important était qu’ils produisaient un produit sucré, sorte de mélange entre le miel, la confiture de figue, la chantilly et la crème de marron.

C’était déconcertant et addictif. Pétronille les adorait et se comportait avec elles comme une mémère à chats. C’était parfait, elle avait leur confiance. Violice n’eut aucune difficulté à la convaincre d’apporter de la nourriture à ses protégés en plus de celle qu’elles trouvaient d’elles-mêmes. Violice et Pétronille testèrent différents produits, cette dernière pour trouver ce qu’elles préféraient et la première pour dénicher ce qui les rendaient les plus productives.

 Après différents tests auprès des ami(e)s de Pétronille, Violice refusait catégoriquement de retenir leurs noms, elle finit par découvrir que de petits insectes, qu’elle désigna sous le nom de « scaraweed », une fois réduits poudres, et mélangés à la « confiotte », c’était un nom de prototype, rendaient cette dernière encore plus addictive.

 Pétronille consentit à laisser Violice employer du verre pour mettre en pot leur production, mais se montra plus retorse lorsque fut arrivée l’étape de commercialisation. Violice parvint malgré tout à la convaincre en lui faisant miroiter un usage raisonné des profits. Elle n’avait pas menti, juste omis le fait que le raisonnement serait entièrement le sien.


Le succès fut immédiat et la demande, renforcée par l’addiction générée, ne cessa de croître. Il fallut donc, comme Violice l’expliqua à Pétronille, rationaliser la production, pour faire entrer leur jeune coopérative éthique et sensible dans l’économie du réel. Pétronille eut encore plus de mal à l’accepter mais Violice lui expliqua grâce à de nombreux schémas et études d’impact, qu’il était tout à fait possible, et que cela était même la seule voie véritable, de joindre un gain financier croissant, et qui devait rester croissant quoi qu’il en coûte, et l’intérêt de ce jeune monde.

« Ce monde est un enfant, Pétronille, lui expliqua à de nombreuses reprises Violice. Un enfant pur, bon et généreux, comme tous les enfants. Malheureusement, le monde est un endroit dangereux et il est très important que nous, adultes raisonnables, nous développions un monde parfait pour qu’il s’épanouisse. Mais un idéal, sans un cadre solide et un fond qui l’est tout autant, sera voué à se dissiper l’air. Tu veux que l’avenir du monde se dissipe dans l’air et que le bonheur ne soit plus qu’un mirage triste s’évanouissant entre les pleurs des enfants ? Non Pétronille, je sais que ce n’est pas ce que tu veux, tu es quelqu’un de bien. »

 La start-up continua de croître et en un mois seulement, elle jouissait déjà d’un bel emplacement en ville, d’une équipe de travailleurs efficaces et d’une solide réputation. Tandis que Violice œuvrait à la diversification de leurs activités et que Pétronille buvait de plus en plus, la première sentit que ce n’était pas encore assez.

 Ce nouveau monde lui était étroit, il fallait qu’elle l’ouvre, c’était sa mission. Elle rencontra alors Jonah la mousse, un explorateur, qu’elle convainquît de travailler pour elle grâce à des arguments fins et subtils.


« Bon, mon petit Jonah, on est d’accord qu’en ville, tout le monde s’en fout de tes explorations, et te considère plus ou moins comme un trou du cul ? Non, je sais, ça ne fait pas plaisir à entendre, et garde à l’esprit que ce sont eux et non moi qui colportent ces bruits immondes. Moi, je crois en toi. Et je me propose de financer tes expéditions. Je te demande simplement pour me rendre la pareille, c’est ce qui se fait entre amis, et nous sommes amis, n’est-ce pas ? de prendre en charge plusieurs personnalités qui se joindront à tes expéditions. Ce sont des cyantifiques, des commerçants et tu n’as pas besoin des détails, disons simplement des spécialistes pour m’aider à dénicher et sélectionner les denrées les plus intéressantes de ce monde. Tu vois, j’ai commencé dans la confiotte mais je pense que l’avenir, c’est d’élargir mon activité le plus possible, devenir un peu la mère Noël de cette belle région ! Tu aimes Noël, n’est-ce pas ? Eh bien, je pense que tout monde mérite une mère Noël, et je veux bien accepter ce rôle, en échange d’une modeste redistribution, oui ne bénéficiant pas de magie mais du simple esprit d’entreprise, il me faudra bien quelques maigres deniers. Alors, tu me suis ? »

Jonah la mousse n’était pas totalement un débile, mais il avait aussi très envie d’accomplir ses rêves alors il signa. Pour le reste de l’équipe, Violice agit plus ou moins de la même manière, à l’exception des deux cyantifiques de l’équipe qui furent plus complexes à recruter. Elle n’avait jamais particulièrement aimé la torture, enfin, les affaires sont les affaires.

Alizé était né et ne cessait de se développer ces dernières semaines. L’objectif était simple : repérer les denrées, trouver le moyen de les exploiter, se servir des demandes des clients pour ajouter d’autres possibilités, améliorer autant que possible les secteurs les plus fertiles, tout en délaissant ceux qui trainaient trop la patte.

La seule tache à cette success story fut sans doute le suicide de Pétronille. Minée par ce qu’elle qualifia de mise en esclavage de ses protégées, elle fut retrouvée pendue dans sa cabane qu’elle avait refusé de quitter malgré les propositions de Violice.

La cheffe d’entreprise ne parut pas vraiment sans soucier. Certains racontent pourtant que des traits d’huile auraient coulé de sa face d’acier. Mais ces témoins sont de plus en plus durs à trouver. Ils semblent avoir une sinistre passion pour la disparition.

Positionnement

Comme expliqué plus haut, Violine est bien insérée tout en ayant de nombreux projets à l’avenir. Elle souhaite en effet poursuivre le développement de son réseau et de sa fortune, afin de peser de plus en plus au sein de la ville, pour au bout du compte, faire sortir l’Esquisse, de ce qu’elle nomme : l’ère de la naïveté.