[ALENTOURS DU FUTUR BAR] Tu as bien piètre allure, mon ami.

Anonymous
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Mar 5 Juil - 3:08
Personne n’aurait probablement parié sur la vitesse de pointe d’un tel animal. Ou du moins, d’un être humain dans un tel état.

Et pourtant.

Les voilà déjà bien loin du lieu de leur rencontre.

Quelque part entre la Base et la Ville. Ni réellement dans un lieu plus qu’un autre. C’est là que Liam choisit de terminer sa course folle. Pour tapoter brièvement le crâne de son oiseau attitré. Et retirer sa chemise.
(Absurde ? Allons, vous ne devriez pas être choqués.)

Avec efficacité, mais aussi une certaine élégance parfaitement improbable, Liam retire donc le vêtement incriminé. Et mouillé jusqu’à l’os. Comme lui, au fond. L’eau semble s’être infiltrée partout. Chassant le fameux liquide rouge de ses clavicules et colorant joyeusement une bonne partie du vêtement blanc en un rose parfaitement élégant.
(Ainsi fut la fin tragique d’une bien trop rare chemise immaculée.)

Face au résultat, Liam hausse un petit sourcil critique, avant de se lancer dans un grand essorage, peu concerné par sa semi-nudité soudaine ou l’eau qui continue de dégouliner le long de ses pectoraux.
(Après tout, ce ne sont pas vraiment les siens, n’est-ce pas ?)
(Comme l’oiseau.)
(Petit Voleur.)

Et tout aussi peu concerné par l’être qu’il a entraîné si loin...
Deux miracles dans la même journée ? Il ne faut quand même pas abuser.
Enfin.
Elle n’est pas terminée, après tout.


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Eelis
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Eelis
Mer 17 Aoû - 16:39
« 8/10. »


Sans prêter attention à tes propres vêtements noyés depuis l'alarme incendie, tu étais devenu quelque jury de concours aux accents douteux. Douteux, mais consciencieux, puisque tu laissais Eelis II inspecter les épaules du candidat (enfin, c'était ce que tu avais envie d'imaginer) pendant que tu te concentrais sur la partie intéressante.

« Avec ces pectoraux, tu es bien parti dans la vie, mais tout ça manque un peu de muscle... » précisa-t-il, alors qu'il prenait des mesures totalement arbitraires avec ses doigts.

C'était lui, sans aucun doute... Mais...

« Tu fais de la musculation le matin ? C'est important pour entretenir ta forme, Bisoux. »

Ce corps était différent dans mes souvenirs... Et même sa tête..
.
« Manger équilibrer aussi - voilà pourquoi il faut te caser, mon pote. Avec ton tempérament, ça va pas être facile, mais y'a du potentiel. »
Et blablabla. Tu continuais de causer tout en effectuant moult mimiques. Même si ton interlocuteur avait tenté de fuir, tu avais l'âme du paparazzi acharné capable de suivre sa cible partout. Et comme toujours, tu te fichais éperduemment de ses sentiments.
Au point d'en profiter ?

« Dis-moi, d'où tu tires ce beau minois ? » demandas-tu, sourire espiègle en guise de maquillage, tout à fait sérieux sans en avoir l'air.

(Pendant que le piaf braillait de façon stupide derrière, mais ce n'était qu'un oiseau n'est-ce pas ?)


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Mer 12 Oct - 8:55
Le flot de paroles coule sur Liam un peu comme l’eau s’échappe de sa chemise malmenée. Dans la plus pure indifférence. Très loin d’une quelconque comparaison poétique d’ailleurs, le liquide rosâtre commence à former plusieurs petites flaques sur le sol. Et, clairement, que ce tissu puisse absorber autant d’eau doit envoyer bouler quelques lois physiques bien bien loin. Mais (cet) l’univers n’en a rien à foutre. Comme Liam, qui, tranquillement, poursuit sa petite besogne.

Ignorant du monde, il l’a en quelque sorte toujours été, mais depuis les récents évènements, on frôle les limites. Difficile de dire s’il éviterait un assaut mortel, là, tout de suite. En tout cas, il ne l’éviterait certainement pas à l’un de ses congénères. Sauf si ce dernier tient les clés de la sortie entre ses mains. La SORTIE, c’est bien tout ce qui semble actionner la machine, désormais.

Florsh. Une nouvelle rasade d’eau s’écrase sur le sol, et Eelis parle à nouveau. Même résultat, à priori. Sauf que la chemise se fait tripoter, au moins.

Minute.

Liam s’est arrêté. Chemise toujours en main, il fixe son interlocuteur unilatéral, la tête légèrement penchée sur le côté.

Et un instant, ses yeux brillent en violet.

Eelis a été entendu.

Et l’improbable se produit.

Un petit rire s’échappe d’entre ses lèvres.

— Je rêve, ou tu essayes de me draguer ?

Les iris pétillent, amusés.
Et ça, ce n’est définitivement, définitivement pas Liam. Liam n’a jamais été doué pour ces choses-là. Ou même intéressé. Et cela vaut autant pour l’humour que pour de quelconques tentatives de flirt. Ou même les relations humaines tout court.

Ce n’est pas Liam.

Et pourtant... pourtant, dans ce rire surpris et plaisant, dans ses yeux qui s’illuminent presque de malice, il y aussi un petit quelque chose. Cet éclat surprenant fut un peu précipité, un peu sec. Comme incongru.

Quelque chose qui semble souffler « C’est ridicule ». Pas maintenant. Pas comme ça. Depuis quand on en est là. Depuis quand on se parle comme ça. Tu n’es pas. Tu n’es pas comme ça.

Qui es-tu ?

Mais c’est une question qui ne franchira jamais ses lèvres. Un cri muet qu’on n’entendra pas. Parce qu’au fond, Liam n’est pas vraiment là. Il ne l’est plus.

Indifférent à l’oiseau qui martèle ses épaules de ses petites serres et de sa chemise toujours aussi mouillée, ce qu’il reste de l’ancien rebelle fixe Eelis. Il attend une réponse. Sans se rendre compte qu’il est loin d’être le seul dans ce cas.

(Ou qu’il ne s’agit pas là que d’un simple échange de plaisanteries.)

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Eelis
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Eelis
Sam 22 Oct - 22:27
Oh, Liam n'était pas le seul dans les iris pétillèrent à l'évocation d'une simple phrase.

« Ah, tu sors enfin le mot magique ! » déclaras-tu, attrapant ton "vieux pote" par l'épaule que n'occupait pas Eelis II, un petit sourire espiègle sur le visage. Faisant mine d'ignorer la question, le doute, le regard qui t'avais été lancé. Tu étais reparti dans ton délire habituel, paré à lui expliquer dans quelle situation il se trouvait.

« Mais ce n'est pas tout à fait ça, vieille branche ! J'essaie plutôt… »

J'essaie plutôt de….

Vide.
Malaise.
Frisson.

De quoi ?

Brusquement, Eelis trembla et retira son accolade aussi rapidement qu'il l'avait initiée. Comme s'il venait de se réveiller. Comme si le fil de sa pensée s'était brusquement interrompu. Le masque se déformait, tiraillé par un léger trouble, expression que le "bon vieux Bisoux" n'avait probablement jamais vue sur ce visage.

Puisque ce n'était plus la même personne derrière ce visage.
Quand bien même elle faisait tout pour le cacher.
Quand bien même elle reprenait - si maladroitement - une expression à peu près potable. Plus normale. Plus "comme lui".

« C'est rien, conclut-il en tendant la main vers la chemise trempée. Si tu veux, je t’essore ça. »

La voix était plus douce, moins exaltée, moins brutale. Je ne connais pas ce type, après tout. Je ne peux pas lui parler comme ce corps m'intime de le faire…

Le "Tu" venait de s'éclipser, comme si le fantôme avait disparu au lever du jour. Ne se tenaient désormais que deux hommes qui se rencontraient pour la première fois. L'un venant de retrouver son corps, l'autre venant de se libérer de son emprise.


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Lun 24 Oct - 17:16
L’espace d’un instant, juste d’un instant, face aux mots et à l’enthousiasme d’Eelis, Liam... « Arrrrr ». Et laisse échapper un léger grognement d’avertissement. Que, bien sûr, l’autre ignore parfaitement pour continuer son petit speetch de coaching intensif. Là-haut, quelque part entre les mèches blondes, une veine manque de comiquement palpiter. Dieu que tout ceci ressemble à un running gag, une quelconque puissance supérieure doit bien se marrer, dans ses petites ténèbres, à regarder ses marionnettes si divertissantes, rejouer encore et encore la même pièce.

Liam a l’amertume au bord des lèvres, et pourtant, dans ces grondements animal qui menacent de sortir, il y a quelque chose de... confortable. Et un instant, juste un instant, l’ancien rebelle est tenté de se laisser porter. D’attiser les braises.

De...
Eelis s’est arrêté.

De ses yeux d’eau vide, Liam capture chaque expression qui veut bien l’animer, chaque geste. L’hésitation. Ses tremblements. Son recul.

ÇA.

Très légèrement, les pupilles de l’homme chat s’écarquillent. Se fendent presque. Contemplent la chute.

Puis la remontée aux allures de château de cartes.
Eelis vit à nouveau.

Immobile, Liam fixe quelques instants la main tendue, l’eau qui dégouline encore et toujours de la chemise. Ses yeux se ferment presque, comme si sa pensée l’avait emmené bien plus loin que l’instant présent. Puis, avec une douceur infinie, mais aussi une fermeté presque autoritaire, Liam arrête la main, glissant la sienne le long de la paume avant de se refermer ses doigts sur la naissance du poignet. En l’enfermant presque. En stoppant là toute course qu’il voudrait bien entreprendre.

Et, enfin, Liam regarde Eelis.

— Qu’est-ce qui t’es arrivé ?

Qui. Es. Tu.
La seule question qui ait réellement de l’importance.
Et... ce n’est toujours pas Liam. Pas tout à fait. Mais ça aussi, cela n’a pas d’importance. Comme l’eau rosâtre qui dégouline maintenant sur son autre bras, ou les serres qui s’enfoncent de plus en plus dans son épaule, au risque de bientôt déchirer la chair.

De Liam qui se noie de plus en plus, au fond.


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Eelis
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Eelis
Mar 25 Oct - 18:42

Merde.
Merde, merde, merde…
Qu'est-ce que je fous ?

Eelis, ou du moins celui qui avait déclaré l'être, sentit le stress lui monter à la tête, comme un sentiment désagréable lui grillant le cerveau. Oh. Le regard de "Bisoux" était soudainement devenu puissant. Effroyable. Perçant. Sa main, transformée en un affreux piège qui le broyait et l'empêchait de fuir.

« Voyons.. Un trou de mémoire, je ne suis plus tout jeune, moi ! » tenta-t-il d'argumenter.

Mais ce n'était pas lui.
Ou plutôt, ce n'était pas Eelis. Ce n'étais pas ce que Tu aurais fait. Il n'y avait pas l'entrain insouciant. Il n'y avait pas le geste. Il tentait vaguement d'imiter un personnage qu'il avait vu, sans réellement en saisir l'essence. Et naturellement, ça ne passait pas. Surtout auprès de lui.

À côté d'eux, l'oiseau ne s'envolait pas. Il martelait l'épaule de Liam sans bruit. Il restait. Etait-il en train d'attendre ? Dans ce cas...

Je vais te donner ce que tu attends, le piaf. Je vais lui dire. Même si j'ai peur de sa main.
Moi aussi, j'en ai marre de suivre aveuglément les instincts. Et je peux pas attendre les bras ballants de voir si "Eelis" revient.


« Liam... Tu m'en voudrais si je te disais que je sais pas moi-même ce qui m'est arrivé ? Si tout à l'heure, dans le couloir, c'était notre première rencontre ? Du moins, à mes yeux. »

Il cessa de regarder son "pote", ou quelque "acolyte" que ce soit. Tourné vers le vague. Impossible de le regarder en face. Pourtant, il continuait d'expliquer. Il ne pouvait plus s'arrêter.

« Je me suis réveillé avec un corps et une identité qui n'étaient pas à moi. Des souvenirs, aussi. C'est pour ça que quand je t'ai vu, j'ai aussi su qui tu étais. »

La pression de cette main, telle qu'Eelis la ressentait et telle qu'elle l'affectait dans son stress, avait diminué. Le mauvais comédien avait jeté son masque par terre, fut-ce la pire erreur à commettre… à moins que l'erreur ait été de vouloir "jouer" avec ses propres sentiments et avec les autres ? Il avait cru pouvoir berner quelqu'un, mais ça n'avait pas fait long feu.

« J'ai su ça, et le fait que je devais te suivre pour savoir qui j'étais. D'une façon ou d'une autre. Alors ce qu'on peut faire.. J'ai juste besoin que tu me dises tout ce que tu sais. S'il te plaît. »

Et après, je te rendrai tout. Ton piaf, tes souvenirs, ta tranquilité. Je te rendrai ce que tu étais avant notre rencontre.

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Anonymous
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Ven 4 Nov - 6:56
— Voyons... Un trou de mémoire, je ne suis plus tout jeune, moi !

Liam ne cille pas. Mais ses doigts se referment un peu plus sur le poignet prisonnier. Une simple pression. Un unique geste. Juste la chair des doigts qui appuient un peu plus sur la peau. Pas un mot. Pas un seul. Mais cela suffit.

Il ne se dérobera pas.
(Pas cette fois.)

Et Eelis ne se dérobe pas.

Il parle. Parle peut-être comme jamais.
Véritablement.

Et tandis qu’Eelis détourne les yeux, Liam l’observe tout entier. Sans se détourner. Pas un seul instant. Tandis que les mots coulent de plus en plus, Liam regarde. Et à chaque parole entendue, résonne en écho. Si Eelis se livre à haute voix, mets les mots sur un malaise imprégné jusque dans ses os, Liam en fait de même. Silencieusement. Intérieurement.

— J'ai juste besoin que tu me dises tout ce que tu sais. S'il te plaît.

Et ses doigts se dérobent. Relâchent le poignet et s’éloignent. Comme Liam, qui fait un pas prudent en arrière. Un seul. Il ne se dérobera pas non plus. Mais il a besoin d’un peu de distance.

Un peu de distance pour... combler celle qui n’existe plus.

Ses doigts s’égarent sur sa propre nuque, y glissent, tout en s’accrochant presque à la peau, dans un croisement entre la caresse et une pression bien moins plaisante. Les yeux mi-clos, Liam penche légèrement la tête et... regarde Eelis. Ne le quitte pas du regard.

Ne ferme pas ses paupières.
Ne se dérobe pas.
Et enfin, parle à son tour.

— Alors je crains que « tu » n’aies pas misé sur le bon cheval.

La voix est rauque, presque écaillée, mais surtout profonde. Elle roule comme une vague, et le léger rire qui résonne, sur les derniers mots, est comme le son d’un ancien moteur. Rôdé, pas cassé. Mais certainement un peu cabossé.

Ce n’est... définitivement pas la voix de Liam.
Tout en étant la sienne.

Liam est tenté de secouer la tête, de fermer les yeux, et de plonger tout droit dans les abysses serpentant à ses pieds. Tout oublier ou se noyer. Tellement d’options tentantes. L’ex-rebelle retient un nouveau rire et regarde plus franchement Eelis. Sa main glisse le long de sa nuque, et revient continuer son travail sur la chemise trempée.

— Si c’était ta première rencontre tout à l’heure, nous vivons peut-être la mienne en ce moment même.

Frrsssh. FLOC. Liam a peut-être assassiné sa chemise, mais toute l’eau semble l’avoir quitté, ce coup-ci. Ou du moins, cela semble suffisant. Après un rapide coup d’œil critique, l’ancien rebelle enfile le vêtement malmené, s’attaquant aux boutons tandis que sa voix résonne à nouveau.

— Je ne compte même plus les tempêtes.

Un bouton, puis un autre. C’est efficace, mais peut-être un peu... brusque.

— Mais ces derniers temps... disons qu’il y en a eu un peu trop.

Être direct, ce n’était pas vraiment son truc.
N’est pas.
Ne...

Un instant, les doigts s’arrêtent, et Liam contemple bêtement son propre torse, comme si lui seul était responsable. Ferme les yeux. Et prends une profonde inspiration.

— Je ne suis plus moi-même.

Ses yeux se rouvrent, et fixent Eelis avec toute la puissance de ses orbes de glace. C’est probablement la meilleure comparaison que l’on peut leur donner. De la glace, qui parfois, reflète une aube violette dont on ignore la provenance.

— Ses doigts ne m’appartiennent pas. Ses yeux ne m’appartiennent pas. Rien, dans tout ce corps, n’est réellement... ma propriété.

Liam accroche l’ultime bouton et adresse à Eelis un sourire si tordu qu’il en semblerait presque tremblant.

— Et pour l’esprit, je n’en suis plus tout à fait sûr.

Inutile de se cacher.

Si Eelis possède « ses » souvenirs... Alors il sait. Liam n’aurait jamais agi comme ça. Parlé comme ça. Depuis le temps, il lui aurait même assené un bon vieux coup de boule des familles, et craché quelques vérités en pleine visage.

Dieu. Qu’il pouvait être vindicatif, quand même.

Légèrement amusé, quelque peu dépité aussi, Liam n’en montre pourtant rien.

Il y a assez de vaisselle sale et brisée sur la table comme ça.

— Mais si tu y tiens...

Quelque chose dans la longueur et le ton des mots ne présage rien de bon. Les infimes rides qui se creusent autour des yeux alors que les lèvres commencent à bouger... enterrent définitivement l’affaire.

— Tu. Es. Stupide.

Rapide mais saccadé. Le dépit dans chaque syllabe. Et l’accentuation du dernier mot qui ne fait aucun doute...

La valse des compliments peut commencer.

— Tu as coutume de pratiquer une chose que tu oses appeler « humour », et que tu ressers à toutes les sauces, tout le temps. Comme un vieux disque rouillé. Je crois que j’ai voulu t’étrangler plusieurs fois. Je l’ai peut-être déjà fait. Je t’ai poussé dans un gigantesque trou, en tout cas. Et j’étais à peine conscient.

Liam ne s’arrête pas, mais fait souvent de petites pauses pour appuyer ses propos. Assène quelques regards critiques particulièrement appuyés. Tente de faire comprendre l’ampleur de la chose au malheureux qui a osé demander.

— Tu es inconscient.

Cette fois, Liam préfère ne pas donner de détails. Le mot suffit. Suffira. Le contraire... remuerait de trop vieilles choses. Alors au lieu de s’y enfoncer, ses lèvres préfèrent esquisser un sourire.

— Et tu devrais vraiment poser des questions. Le « sujet » est vaste.

Humour contre amertume. Légèreté contre sentiments trop profonds. Une discussion contre une autre.

Liam ne s’enfuit pas.
Mais il danse comme une véritable ballerine.

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Eelis
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Eelis
Jeu 24 Nov - 18:04
Longuement, il observa cet homme qui, loin d'être déstabilisé ou incrédule, l'avait patiemment écouté avant de prendre la parole à son tour. Par à coups. Tantôt par rires amers, tantôt par silences. Sur le fond d'une chemise qu'on essore et qu'on remet. Au milieu des débris de la Ville. La discussion pittoresque entre deux acteurs qui ne reconnaissent plus le costume mais se remémorent - comme ils le peuvent - le script qu'ils ont jadis suivi. Deux blonds qui consultent les albums de familles où ils ne se reconnaissent plus. Pourtant, dans cette ironie, le plus jeune continuait d'utiliser le "Tu".


Est-ce qu'on parle vraiment de moi ?
Ou est-ce qu'on parle de Toi ?
Ou peut-être de lui…
Voire de vous.
D'eux.


« Hmmm... » marmona-t-il pour couper court à sa propre réflexion, une fois que "Liam" eut longuement parlé. Devait-il l'appelait encore ainsi, si lui-même doutait être réellement dans ce corps ? Pour l'instant, il se contenterait lui aussi des pronoms, puisque la communication ne pouvait se faire autrement.

En tous les cas, ce n'était pas aisé. Ni de comprendre l'implication de tout ce qui venait d'être dit. Ni les sentiments de cet homme. Ni ce qu'il était convenable de répondre… Tu aurais sans aucun doute sorti quelque ânerie pour détendre l'atmosphère et réduire le débat à néant. Quelque chose qui détourne, mais aussi qui allège.

« Et toi, qu'en penses-tu ? »

"Il" ne pouvait pas en faire autant. Il sentait son coeur s'alourdir. L'inquiétude vitale le contraindre à décider, réfléchir, faire le bon choix - s'il en existait un. Si Liam n'était pas le bon cheval, comme il le prétendait, sans doute aurait-il au moins un conseil à ce sujet. Il précisa :

« Est-ce que tu veux continuer de vivre en te nommant Liam, avec pour seul but de t'accrocher à ce que tu étais ? Est-ce que tu vas faire table rase et considérer qu'à partir de maintenant, ces corps sont les nôtres ? »

La première solution était peut-être la plus noble. La plus affirmée. La seconde était la plus facile, mais peut-être aussi la plus raisonnable, plus "pratique". Enchaîné par le passé, on n'avant jamais. Pleinement dans le présent, on a tous les avenirs. Il les jaugeait, cherchant celle qui était "lui" davantage qu'une autre.


Vide.


« Peut-être qu'il ne vaut mieux pas se préoccuper de tout ça… Et alors, je n'en demanderais pas plus. Que ce soit sur moi ou sur toi. Qui cherche à savoir la vie d'un autre type qu'il n'a pas connu ? » ironisa-t-il.

Mais peut-être qu'on ne trouvera rien d'autre. Qu'on restera des disques rouillés, ou qu'on deviendra pire encore et qu'on perdra totalement la tête parce qu'on aura plus rien. Tu le sais aussi, pas vrai ?

Il s'approcha de son interlocuteur, comme s'il cherchait à comparer leurs tailles ou à faire un duel de regards. Puis - s'agissait-il ou non d'une réminiscence d'un Eelis collant qui commençait à revenir ? - posa sa main sur son épaule. De façon un peu maladroite sans doute. Il venait de mettre le doigt sur ce qui était le plus important.


« J'ai une dernière question, Liam. »


Sans doute que je devrais même pas te le demander.


« Quel est ton but ? Et quel est le mien ?»


Mais moi aussi, je suis un oiseau perdu.

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Anonymous
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Dim 8 Jan - 15:15
Eelis parle.
Parle comme jamais.
Tant de mots.

Liam cache un reniflement derrière ses mèches cendrées. Il se sent terriblement ironique. Et tandis que les questions s’enchaînent, ces yeux qui ne lui appartiennent plus s’échouent sur ses mains maintenant jointes. Mains de pianiste. C’est toujours le cas. Mais ce n’est plus la même finesse qu’auparavant. C’est toujours incroyablement fin. Des mains qui semblent avoir été façonnées pour la musique. Mais ce ne sont pas les siennes. C’est comme passer d’une brindille à la plus ridicule des branches. C’est toujours incroyablement fragile, mais la différence est telle qu’elle est en tout bonnement grotesque. Ses mains sont grotesques. Des doigts si longs et si fins qu’ils en semblent irréels au reste du monde. Et à ses yeux, aussi discrets que deux foutus troncs d’arbre.
Ce ne sont pas ses mains.
Ce sont les siennes.
Ce ne sont pas... ses mains à Lui.

Quel ridicule patchwork. Liam secoue imperceptiblement la tête.
Il est une foutue couverture de grand-mère. L’indécision entre l’horrible tenture des rideaux et le textile qui gratte des coussins.
Ni complètement l’un, ni complètement l’autre.
Ni l’un, ni l’autre, au fond.
Mais incapable d’être sans eux.


Eelis est trop près.
L’ancien Liam aurait eu un mouvement de recul. Plus ou moins violent. (Plus que moins.) Le nouveau se contente d’un infime sursaut. Et de le regarder à nouveau franchement, et non à travers ses cils. Il n’a pas arrêté d’écouter. Ni de regarder. Il semble peut-être s’éloigner. Mais il reste là. Il ne partira. Et n’est pas réellement parti, malgré ses pensées étouffantes. Son regard ne l’a pas quitté, de tout son discours. Mais... il s’est peut-être un peu égaré. Parce qu’il ne pensait pas si près. Si proche.

Quand l’est-il devenu autant ?

— Quel est ton but ? (Et quel est le mien ?)

Pendant un instant, son visage entier semble s’écrouler avant de se reconstruire. Durant un fragment d’éternité, tellement de choses le traversent qu’il n’arrive à en exprimer aucune. Tout juste esquisse-t-il un sourire un peu tremblant, avant que ce dernier ne se transforme en mimique assumée. Et c’est bien tout ce qu’Eelis pourra voir de ce dilemme silencieux.

— Arriver à en placer une.

Le rire qui s’échappe d’entre les mots est franc, légèrement accusateur.
Depuis quand parles-tu autant Eelis ? Aussi sérieusement ? Où sont passées les bonnes vieilles blagues carambars et les discussions sans queue ni tête ? Que tu sois le plus sérieux de nous deux est comme une blague à l’échelle de l’univers tout entier.
C’est ce que semble souffler son amusement doucement réprobateur. Mais il ne le dira pas.
Car... tu n’es pas tout à fait Eelis, n’est-ce pas ?
Non, tu ne l’es pas. Et ce n’est pas important.


Alors Liam laisse tomber son sourire et entoura l’intruse sur son épaule de ses propres doigts avant qu’elle ne s’échappe. Son visage se penche légèrement sur le côté et il ne résiste que de peu à l’envie d’y blottir sa joue. (Les gènes félins et donc affreusement câlins sont un cauchemar pour quiconque veut maintenir un minimum de dignité).

— Je ne sais pas.

Sa salive est affreusement difficile à avaler, soudainement. Et il ne tremble absolument pas si fort à l’intérieur. Non. Ce sont ses stupides instincts. Il n’est pas un foutu nouveau-né qui tremble d’être abandonné... oh bon sang.

— Ton... but n’appartient qu’à toi. Emmerde ceux qui prétendent le contraire.

Les autres. Tes souvenirs. Lui. Peu importe. Tout n’est qu’un même panier.
(Et vous, vous êtes les pommes à côté.)

— Mais... Je veux sortir. Au moins un truc sur lequel "on" est d’accord. (Dans le creux de la main d’Eelis – non il n’a finalement pas résisté – Liam étouffe un bref rire.)

L’Être de tes souvenirs. Mais que tu n’es pas. Ça commence à être un peu plus clair là-dedans. Même si ça ressemble toujours à un foutu panier de crabes.

Ses yeux un instant fermés se rouvrent et contemplent Eelis tout entier. Sans chercher à savoir ce qui peut réellement bien y flotter – parce qu’entre ça et le câlin qu’il inflige à la main prisonnière, son ego est assassiné. La question qu’il s’apprête à poser est probablement la pire chose de toutes, et ne pas simplement se détourner, la plus difficile.

Je ne connais pas ton but.
Et je ne te l’imposerais pas.
Mais...


— Mais on peut peut-être chercher ensemble ?

La Sortie. Tout ce que tu voudras.
Mais juste.
Ne m’abandonne pas.

(OK. C’est décidé. Il veut mourir.)
(Tout de suite.)

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Eelis
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Eelis
Lun 30 Jan - 15:43

Toutes les oscillations de la parole sont comme flashées par un stroboscope ; nom qu'on donne à un outil qui prend les clichés à une fréquence que l'oeil humain ne peut pas suivre. Des flashs saccadés, de vieilles images  qui forment un piteux film. Alors qu'ils croient ne plus être observés, ne plus être contraints, ne plus être captés, ils alternent en réalité les phases de lumières et les période d'ombre. Si vite qu'ils ne le réalisent pas que le chat et le perroquet qui les regardent ont bien plus de libre-arbitre qu'eux. Ce sont après tout les seuls à ne pas refaire sempiternellement les mêmes discours, contrairement à la boucle infinie projetée sur le mur.

Eelis ne sut pas vraiment quoi faire de cette main qu'il avait lui-même donné. Ni quoi faire de cet homme qui y était pendu, quelques minutes après leur première rencontre.

Après l'intérêt, puis le doute, il ressentait une pointe de compassion pour le blond, comme s'il percevait en partie les fissures qui le recouvraient, telles qu'elles étaient révélées par l'amertume de ses phrases et accentuées par chaque expression. Tout comme il avait une part de résignation, une part de lui s'accrochait à cette sortie qui, dans une pièce sans porte ni fenêtre, n'était peut-être qu'une illusion. Est-ce qu'on peut sortir d'un monde ? La même pitié que l'homme avait pour Liam, doublée d'une certaine douceur, le poussait à ne pas poser cette question.
(Difficile de dire lequel des deux avait adopté l'autre, définitivement)

« La sortie, donc ? Ça me va. »

Une mauvaise blague lui resta dans le fond de la gorge : C'est par où ?
Au lieu de cela, il détourna les yeux de Liam, pour mieux les faire glisser sur la "pièce", en tout ce qu'elle pouvait signifier pour deux hommes perdu au milieu d'une rue. Il avait la sensation, ou plutôt le vague souvenir, que Liam avait passé énormément de temps à chercher. Il pouvait être sceptique sur les chances de réussite, mais pas sur la détermination du bonhomme. Alors même qu'Eelis ne cherchait pas la sortie, il souhaitait qu'il en existât une, tout proche d'eux. Pourtant, il ne parvenait pas à se leurrer.

La sortie, donc, et maintenant ?
C'est le perroquet qui siffle la réponse.
(Non, pas celui-là)

« Enfin, d'abord, ce serait bête d'attraper froid, pas vrai vieille branche ? s'exclama-t-il avec un faux regain d'assurance. Tu me raconteras ton plan à la terrasse d'un bon café ! »

Sa main encore libre se dirigea vers Liam. Pichenette dans le front.

Rompant brutalement la confession câline, Eelis l'entraîna sans vergogne à sa suite, droit dans une direction qu'il ne connaissait pas. Mécaniquement, sous les flashs du stroboscope toujours aux aguets, suivi par le perroquet qui paraissait tout à fait exalté à cette idée.

« Tu connaitrais pas un restaurant sympa qui serait ouvert en ce moment ? Pas trop loin, de préférence. »

Un sentiment de déjà-vu, Liam ?
(C'est juste une illusion)
(Vraiment)


Spoiler:



(Merci à Ara' pour la super signature ♥)

Test:

Anonymous
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Sam 1 Avr - 20:00
— La sortie, donc ? Ça me va.

C’est comme s’il respirait pour la première fois.

Les mots d’Eelis sonnent comme le foutu air dont il a besoin pour vivre. Et ça le terrifie. Cela ne fait que quelques minutes. Quelques minutes qu’ils se connaissent vraiment – et ce n’est pourtant qu’un effleurement. Quelques minutes qu’ils ont laissé tomber les masques – et pourtant, il y a tellement de morceaux par terre. C’est, définitivement, la pire blague de l’univers. Ils sont la pire blague de l’univers. Et dieu, tout ça va se casser la gueule.

Mais Liam est si soulagé qu’il pourrait presque arrêter de respirer.
(Et de penser inévitablement à ce qui va mal tourner.)
(Parce que ça ne peut que mal tourner.)

La boule dans sa gorge est l’une des pires choses qu’il ait jamais connues – et pourtant, il ne l’échangerait pour rien au monde. Pour la première fois – la première fois depuis longtemps, il a l’impression d’être. D’être à nouveau.

Précaire est un adjectif grotesque.
C’est tellement pire.

Mais Liam marche à nouveau.
C’est un équilibre brisé, qui ne tient qu’avec des bouts de ficelle de mauvaise qualité – mais il existe, et c’est tout ce dont il a besoin maintenant.
Ça, et d’Eelis.
(Il serait temps de l’admettre.)

— Tu me raconteras ton plan à la terrasse d'un bon café !

Le rire de Liam à ces mots est encore un peu nerveux.
Pardonne-le Eelis, tout ça est encore nouveau pour lui.
(Il n’arrive pas encore tout à fait cacher tous ses cauchemars derrière son sourire.)
(Mais il essaye quand même.)
(Cela tremble juste un peu.)

Eelis recule, se secoue, observe le monde autour d’eux. Puis s’éloigne. Avance lui aussi à nouveau. Vit.

C’est un doux sentiment. Un peu amer.
Et ils ne sont définitivement pas sortis de l’auberge. Mais Liam veut bien essayer.


Alors il s’avance à son tour, et tape joyeusement sur l’épaule de son compère, un sourire amusé sur les lèvres.

— Très honnêtement, je te déconseille de goûter à la cuisine locale.

Et le dépasse légèrement, ouvrant la marche.
Tantôt souriant tantôt terriblement sérieux, tandis qu’ils devisent sur la gastronomie des environs. Plus que jamais acteur derrière le masque.

Mais avec un petit espoir, à l’intérieur.
(Si fragile.)
(Mais qui brille, si fort.)
(Que Liam continue juste de sourire.)

Il n’est peut-être pas grand-chose. Il est peut-être aussi morcelé qu’une sculpture brisée.

Mais il est.

Spoiler:

LA SUITE...
DANS LES CHRONIQUES.

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