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Messages : 130
Date d'inscription : 21/09/2019
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Lhûn
Mer 22 Avr - 6:56
En guise d'introduction...
Ce texte n'a pas moins de 10 ans, mais il reste l'un de ceux dont je suis le plus fier. Il contient des passages pouvant choquer la sensibilité de certains, ainsi vous recommanderai-je de l'aborder en lecteur averti. J'espère que vous l'apprécierez !
C'est un flash-back, où Maellen, ensorceleuse malgré elle, redécouvre une partie de son passé, oblitéré par sa conscience. Aleki, son plus grand ami, l'a toujours soutenue... mais ses sentiments sont trop profonds pour être à sens unique...
Pour rendre la lecture optimale, téléchargez les polices si vous ne les avez pas déjà : j'utilise Book Antiqua, et Zenda.
NB : Les Avariels dans cet univers sont des Elfes ailés, vivant dans une société cachée des mortels. Et certains ont des pouvoirs insoupçonnés.
Elle était chez elle. Dans la pénombre des chandelles oscillantes. Elle ne se rappelait pas les évènements récents. Elle avait l’impression d’avoir été juste avant avec son maître de magie, mais elle était ici. Elle se sentait une langueur inhabituelle, comme si elle sortait d’un long sommeil. Elle ne distinguait pas grand chose au travers du brouillard de ses yeux, mais bientôt il s’éclaircit. La lumière était à peine suffisante pour qu’elle ne devine les contours des meubles. Pourtant, elle les vit. A terre. Deux corps immobiles. Ceux qu’elle aimait… Elle cria. C’était impossible ! Elle se précipita vers eux, tentant désespérément de les ranimer. En vain. Ce fut lorsqu’elle s’assit sur ses pieds, effondrée, qu’elle remarqua. Elle leva ses mains vers son visage. Même à la lumière incertaine, elle pouvait le voir. Ses mains étaient rouges... Du même rouge que le sang qui coulait des plaies béantes de ses parents, du même rouge que le sang qui maculait le couteau qu’elle se souvenait avoir lâché un peu plus tôt.
- Non !
Elle voulut refuser l’évidence. Mais comment ne pas croire à ce que l’on a sous les yeux ?
- Non ! Non !
Elle pleura. Les larmes étouffèrent ses cris. Mais elle avait certainement déjà été entendue... Elle s’en moquait. Tremblante, elle s’éloigna des corps, vers l’endroit où elle se trouvait avant de comprendre l’horrible réalité. Ses mains tremblèrent encore plus lorsqu’elle saisit le couteau. A genoux, elle tourna la pointe contre sa poitrine. Les dernières larmes qu’elle pourrait verser s’écoulèrent, réchauffant ses joues glacées. Elle serra les dents, mordant ses lèvres jusqu’à ce qu’elles en saignent. Ses yeux se fermèrent douloureusement. La pointe s’éloigna légèrement, pour mieux frapper...
- Maellen ! Non !
Elle ouvrit les yeux, laissant son geste en suspens. La lame lui glissa des doigts, retombant lourdement sur le sol. La voix lui était plus que familière. L'Avariel aux cheveux blancs et noirs éloigna le couteau d'un coup de pied. Il s’agenouilla à côté de son amie.
- Ce n’est pas la solution...
- Je les ai tués...
- Je n’y crois pas.
- Comment peux-tu dire ça ! Regarde autour de toi !
- Je te connais... Je n’y crois pas.
- Pourtant...
La jeune femme baissa les yeux. Elle aurait tellement voulu que tout ceci ne soit qu’un rêve. Mais elle était bien réveillée, elle le savait...
- Je ne veux plus vivre... Ils sont morts...
Le visage d’Aleki se tordit en un rictus douloureux. "Mais ne sais-tu pas qu’ils n’étaient pas les seuls à t’aimer ?" Il sentait les larmes lui venir aux yeux. Mais il ne dit rien. Tout ce qu’il ressentait depuis le premier jour ressortit à présent. "Tu n’es pas seule..." Non, elle n’était pas seule... C’était lui qui l’était... Il le serait tant qu’il ne lui dirait pas. Mais il ne pouvait pas... Il connaissait les sentiments de Maellen à son égard. Il ne voulait pas gâcher la relation qu’il entretenait, précieuse, avec elle. Il souffrait de ne pas faire cet aveu, si simple et si complexe, tout comme il souffrait de savoir ce qui arriverait s’il trouvait ce courage. Pourtant, à cet instant...
- Excuse-moi...
Il prit le couteau avec lui, et sortit en courant. Il ne voulait pas qu’elle voie ses larmes. Ces larmes d’amertume, de dégoût, qui, il le savait, démontrait son amour pour elle... Dans la rue déserte, il s’appuya contre un mur, se laissant glisser jusqu’au sol. Il laissa venir les gouttes salées. Malheureux de ne rien pouvoir pour sa compagne, furieux aussi... Mais cette colère s’estompa rapidement, comme disparaissant de lui. Ne lui restait alors que son désespoir...
- Imbécile.
Aleki leva les yeux, et ce qu'il vit n'était autre que... lui-même. Les yeux dorés fixaient les siens, rougeoyants. L'Avariel ne comprit pas ce que cela signifiait. Il se contenta de regarder son image, hébété.
- Tu es égoïste. N'entends-tu pas Maellen qui pleure tandis que tu te lamentes ? Aurais-tu oublié qu'elle a bien d'autres moyens d'attenter à sa vie pendant que je te l'explique ? Regarde-toi...
Et il se vit tel qu'il était. Comme s'il voyait aux travers des yeux de son double - mais n'était-il pas lui, après tout ? - il se vit, mi-assis, mi-accroupi, effondré, ses plumes d'un blanc presque doré en désordre, les yeux embués, regardant dans le vague... Misérable, pitoyable...
- ... pathétique...
Il ne put que baisser les yeux et approuver. Il savait que c'était ce qu'il ressentait lui-même... Sauf que ce "lui-même" s'était détaché de lui... Il connaissait avant même qu'ils ne soient prononcés les mots qui allaient sortir de la bouche de son ego. Car son esprit y faisait écho.
- Tu n'es qu'un lâche.
Maellen ne comprenait pas. Pourquoi était-il parti ? Elle avait dit cela pour montrer son grand besoin de réconfort. Et il était parti, sans comprendre... Pourtant, elle savait qu'au fond, ces paroles prononcées sans réfléchir reflétaient la stricte vérité. Ceux qu'elle aimait n'étaient plus, par sa faute. Sans eux, elle ne se sentait plus à sa place ici, ni même sur la terre. Aleki avait emporté le couteau, pensant éviter ainsi le risque qu'elle ne se fasse du mal. Mais au fur et à mesure qu'elle y pensait, cela s'éclairait, devenant une évidence. Elle ne méritait plus de vivre... Et elle regardait les deux corps entrelacés même dans la mort, avec pour seule envie de les rejoindre. Ses lèvres subirent encore la morsure de ses dents, qu'elle aurait voulu plus ferme, plus douloureuse. Cela ne la soulageait pas. Les larmes continuaient d'effleurer ses joues, malgré elle, elle ne les retenait pas.
Elle entendit des voix, dehors. Elle ne fit pas l'effort de les reconnaître. Elle se laissa tomber. Assise ainsi, entre ses jambes pliées, elle paraissait telle une petite fille, perdue. Pourtant, dans l'esprit de l'Avarielle, les choses étaient plus claires que jamais. Elle avait déjà pris sa décision, elle s'y tiendrait. Repliant ses ailes d'argent autour d'elle, elle ferma les yeux. Posant ses deux mains l'une contre l'autre devant sa poitrine, on aurait pu la croire en prière. Mais elle rassemblait ses forces, le peu qui lui restait d'énergie. Envoyée en un point précis de son corps, elle achèverait sa vie...
A genoux dans la poussière de la rue, Aleki regarda son autre lui entrer calmement dans la maison de Maellen. Il ne pouvait que le laisser faire. Comme il l'avait dit, comme lui-même l'avait ressenti, sa lâcheté l'empêcherait d'agir... Mais il avait confiance. Si son corps s'était divisé en deux moitiés, c'était sans doute pour une raison précise. Ici, certainement pour qu'il ose venir en aide à sa jeune amie... Il ferait ce qu'il faudrait... Et il se voyait en permanence spectateur et acteur. Chacun était étroitement lié à l'autre...
Il s'approcha d'elle comme d'un petit animal apeuré. Mais voyant Maellen prostrée, une flamme bleutée en train de se former entre ses mains, Aleki faillit perdre sa contenance. Il courut vers elle, et sépara vivement ses doigts, qu'il garda serrés entre les siens. L'énergie ainsi récoltée se dissémina de nouveau dans le corps de l'elfe, éloignant tout danger. "Du moins, dans l'immédiat." Les yeux dorés regardèrent Maellen avec une intensité qui lui fit détourner les siens.
- Tu veux vraiment mourir ?
L'enchanteresse ne dit rien. S'il posait la question, c'est qu'il connaissait déjà la réponse. Lâchant une de ses mains, il prit délicatement le menton de Maellen, et le tourna vers lui, la forçant à le regarder.
- Dis-moi pourquoi. Je ne comprends pas.
Maellen secoua la tête. Il le savait, alors pourquoi ainsi la tourmenter ?
- J'ai du sang sur les mains. J'ai tué ceux que j'aimais. Je ne mérite plus...
Aleki lui posa un doigt sur la bouche, l'empêchant de continuer.
- N'as-tu jamais pensé qu'ils n'étaient pas les seuls pour qui tu pouvais vivre ? Il y sans doute quelque part quelqu'un qui t'aime autant, si ce n'est plus, qu'eux, tu ne crois pas ?
- Comment quelqu'un pourrait-il m'aimer après ce que j'ai fait ?
- Réfléchis... L'amour ne se mérite pas. Il ne se déclare pas en fonction de tes actes. De même que la vie. Ne dis pas que tu ne mérites plus de vivre. Elle t'a choisie pour être ici, ne la détruis pas sans savoir... Car je ne mérite pas plus de vivre que toi...
Maellen détourna de nouveau la tête. Elle connaissait son passé. Que répondre à cela ? Mais ce n'était pas ainsi qu'elle le ressentait. Et y avait-il une personne au monde qui soit capable de lui faire changer d'avis ?
- Maellen, tu ne comprends pas...
Aleki secoua la tête. Il avait reproduit exactement la même erreur. Il n'avait pas été direct, espérant qu'elle saurait le reconnaître dans ses propos. Mais elle était trop aveuglée par son propre chagrin... Que fallait-il qu'il fasse pour qu'elle ouvre enfin les yeux ?
- Maellen...
Lâchant complètement ses mains, il la saisit par la taille et la souleva, pour la forcer à rester sur ses pieds. Elle ne se fit pas prier, mais ne le regardait toujours pas.
- Maellen, ce n'est pas ta faute...
Pas une réaction. Alors il la prit dans ses bras, comme le grand frère qu'elle voyait en lui. Doucement, il la berçait, pour la calmer, la rassurer. Il dégagea son visage de ses lourds cheveux noirs, espérant qu'elle lève les yeux.
- Maellen, que dois-je te dire... ?
Et soudain, comme si le fait de prononcer une énième fois son nom avait débloqué ses barrières, un torrent de larmes s'échappa de ses yeux, silencieux. Soulagé, Aleki la laissa se reposer sur son épaule. Elle avait besoin de réconfort, il était la pour lui en donner.
- Pleure tout ce que tu peux, si cela te fait du bien...
Il caressa ses cheveux, la sentant progressivement se détendre. Alors qu'elle avait le corps encore secoué de sanglots, elle leva les yeux vers lui, en un remerciement muet. Il l'embrassa sur le front, essuya les joues humides. Puis il posa sa main derrière sa tête, posant ses lèvres dans la chevelure abondante.
La détresse de la jeune Avarielle le touchait plus qu'il ne le pouvait penser... Cela fit ressortir un désir qu'il avait enfoui pour le bien de sa compagne...
Sa main glissa lentement le long de la soie de ses cheveux, continuant la caresse jusque dans son dos. Ses pleurs semblaient s'être calmés, elle ne réagit pas. Les doigts remontèrent lentement, jusqu'à atteindre la fine bretelle qu'ils firent descendre le long de l'épaule. Maellen recula la tête, les yeux vides.
- Je ne veux pas...
Aleki la fit taire d'un baiser. Elle sursauta, s'échappant de ses bras. Il la retint avant qu'elle ne tombe, elle le repoussa. Mais sans vigueur.
- Je ne veux pas...
Elle tomba. L'Avariel se pencha sur elle, un sourire bienveillant aux lèvres, le regard aimant. Elle recula, comme elle le pouvait. La bretelle de la fine robe de moire continuait son chemin sur le bras de la jeune femme. Elle ne le remarqua pas.
- Je ne veux pas...
Aleki l'avait rattrapée. Avant qu'elle n'ait pu résister, il la serrait dans ses bras, embrassant son visage et son cou avec beaucoup de douceur.
- Je ne veux pas...
C'était une créature sans force qu'il avait dans les bras. Elle répétait inlassablement cette phrase, mais ne pouvait rien pour empêcher son compagnon de succomber aveuglément à sa passion.
Son double le voyait. Plus il avançait, et plus Maellen était envahie par la peur. Il savait qu'elle ne comprenait pas le comportement de son ami, qu'elle se savait impuissante face à cet excès de zèle. Et lui pauvre spectateur ne pouvait que regarder la débâcle de sa confiance. Pouvait-il se raisonner lui-même ? Il pouvait toujours essayer... *Elle dit qu'elle ne veut pas...* Ce fut cette phrase, la seule que sa couardise lui permettait de prononcer, il le savait, qui provoqua la rupture. Car la réponse qu'il entendit fut la pire qu'il pût imaginer. Il la reçut comme une gifle. *Et alors ?* Etait-ce cette courte phrase, ou le sentiment de se retrouver seul dans son propre esprit qui le projeta en arrière ? Il ne le sut pas. Mais alors des larmes coulèrent de ses yeux devenus verts. Il comprenait que c'était lui qui modérait son ego. A présent, il n'avait plus aucun frein... Et il ne pouvait que regarder sa bien aimée subir ce qu'il n'aurait jamais souhaité à aucune femme... Et c'était lui-même qui... Il savait ne pas pouvoir intervenir, même si c'était ce qu'il souhaitait de tout son être... Car ils étaient deux, et cela ne se pouvait. Parce qu'il était lui, chaque moitié complémentaire de l'autre.
Les caresses se firent plus fougueuses, les baisers plus rudes. Il entendit à peine Maellen crier. Il avait été libéré de ses entraves, il était seul à présent à dicter les mouvements de son corps. Il se pencha sur l'elfe, à présent débarrassée de sa robe... Elle se recroquevilla sur elle-même, profitant du mince relâchement de l'emprise qu'il avait sur elle. Il la laissa aller, la regardant avec patience, comme un prédateur observe une proie qu'il a déjà capturée... Elle était nue, et ainsi à découvert, fragile et sans défense... Elle qui était habituellement si encline à provoquer innocemment le désir des hommes simplement par ses formes charmantes était devenue soudainement pudique... pour lui, songea-t-il... Il appréciait cela aussi. Il profitait de la vue qu'elle lui offrait... Tout cela... Elle n'en était que plus désirable. Mais il vit cette lueur effrayée dans ses yeux. Il ne comprit pas. Comment pouvait-elle avoir peur de lui ? Il avait toujours pris soin d'elle... Il décida que ce n'était qu'une illusion dûe à sa propre excitation. Elle avait fermé les yeux... Etait-elle résignée ? Lui pensait qu'elle s'offrait.
Mais lorsqu'il s'approcha de nouveau, sa volonté avait refait surface. Ses grands yeux noirs s'ouvrirent, et elle recula, nettement terrorisée. Cela le mit en colère. Elle buta contre quelque chose de mou, qui entravait sa fuite. Elle se retourna, et cria. Elle était coincée contre le corps de ses parents, et Aleki était trop proche... Elle n'avait plus le temps de partir, ni de tenter quoique ce soit contre lui... Il était sur elle... Elle cria encore, exprimant sa peur et son horreur, désespérant que quiconque ne l'entende...
- Aleki ! Je ne veux pas !
Aleki se bouchait les oreilles. Au seuil de la maison, il tremblait... Cela représentait toute la colère, la frustration, le désir que son entier retenait depuis si longtemps. Comment aller à son encontre ? Il regarda pourtant, témoin horrifié de ce dont lui-même était capable... Et il vit...
Aleki était au dessus de Maellen. Ses deux mains la plaquaient au sol, dans le sang des deux elfes égorgés. Elle était horrifiée, tétanisée. Ses cheveux y baignaient, lui laissant ce goût amer. Son corps nu était couvert de ce sang qui lui avait fait perdre le goût de vivre. Il semblait prendre encore plus de plaisir à voir ses yeux révéler le poids de sa culpabilité que la terreur qu'il lui infligeait. Ironiquement, c'était celui-là même qui l'avait convaincue de rester un peu plus longtemps de ce monde, qui était en train de lui faire regretter de l'avoir écouté. Elle avait cru que cet être infâme était son frère. Il était un monstre. Elle criait sa terreur alors qu'il en jouissait. Mais elle ne pouvait rien contre son bourreau. Trop fort pour elle, misérable petite créature ailée qui venait de perdre sa liberté. Il souriait de son impuissance, en profitant pour la couvrir de baisers immondes. Elle savait qu'elle ne pouvait rien. Elle pleura, et ne résista plus. Elle commençait à se résigner à son sort. Non pas par faiblesse, cette fois, mais étant impuissante contre ce qui lui arrivait, elle préférait éviter des souffrances inutiles... Mais Aleki sembla en prendre moins de plaisir. Sa réaction n'en fut que plus violente. Il la prit alors avec une brusquerie inhumaine, et le sang de l'Avarielle se mêla à celui de ses parents. Ses larmes redoublèrent, mais ce n'était autre que du sang qui coulait à présent le long de ses joues. Maellen ferma les yeux, supportant tous les assauts sans plus un mot. Pourtant, la douleur l'assaillait de toute part. Même ses ailes protestaient. Coincées sous le corps immobilisé de la magicienne, leurs os fragiles craquaient un peu plus à chaque à-coup.
Aleki pleurait, ne pouvant détacher son regard du terrible spectacle qui s'offrait à lui... Il regretta sa lâcheté, mais il regretta aussi d'en souffrir : car sans cette culpabilité, elle n'aurait pas connu cela, même si elle n'aurait plus été de ce monde. Elle aurait préféré, mais elle n'avait pas réellement eu le choix...
Puis tout s'arrêta. Maellen sentit le corps d'Aleki quitter le sien, lui laissant pour tout linceul son propre sang et un courant d'air. Elle ouvrit une dernière fois les yeux : il la regardait. Sans cruauté, mais sans amour. Il la regardait. De ses yeux froids. Rouges comme le sang qu'ils avaient chacun leur tour fait couler. Puis elle sombra dans de bienheureuses ténèbres.
Ce texte n'a pas moins de 10 ans, mais il reste l'un de ceux dont je suis le plus fier. Il contient des passages pouvant choquer la sensibilité de certains, ainsi vous recommanderai-je de l'aborder en lecteur averti. J'espère que vous l'apprécierez !
C'est un flash-back, où Maellen, ensorceleuse malgré elle, redécouvre une partie de son passé, oblitéré par sa conscience. Aleki, son plus grand ami, l'a toujours soutenue... mais ses sentiments sont trop profonds pour être à sens unique...
Pour rendre la lecture optimale, téléchargez les polices si vous ne les avez pas déjà : j'utilise Book Antiqua, et Zenda.
NB : Les Avariels dans cet univers sont des Elfes ailés, vivant dans une société cachée des mortels. Et certains ont des pouvoirs insoupçonnés.
Souffrances
Elle était chez elle. Dans la pénombre des chandelles oscillantes. Elle ne se rappelait pas les évènements récents. Elle avait l’impression d’avoir été juste avant avec son maître de magie, mais elle était ici. Elle se sentait une langueur inhabituelle, comme si elle sortait d’un long sommeil. Elle ne distinguait pas grand chose au travers du brouillard de ses yeux, mais bientôt il s’éclaircit. La lumière était à peine suffisante pour qu’elle ne devine les contours des meubles. Pourtant, elle les vit. A terre. Deux corps immobiles. Ceux qu’elle aimait… Elle cria. C’était impossible ! Elle se précipita vers eux, tentant désespérément de les ranimer. En vain. Ce fut lorsqu’elle s’assit sur ses pieds, effondrée, qu’elle remarqua. Elle leva ses mains vers son visage. Même à la lumière incertaine, elle pouvait le voir. Ses mains étaient rouges... Du même rouge que le sang qui coulait des plaies béantes de ses parents, du même rouge que le sang qui maculait le couteau qu’elle se souvenait avoir lâché un peu plus tôt.
- Non !
Elle voulut refuser l’évidence. Mais comment ne pas croire à ce que l’on a sous les yeux ?
- Non ! Non !
Elle pleura. Les larmes étouffèrent ses cris. Mais elle avait certainement déjà été entendue... Elle s’en moquait. Tremblante, elle s’éloigna des corps, vers l’endroit où elle se trouvait avant de comprendre l’horrible réalité. Ses mains tremblèrent encore plus lorsqu’elle saisit le couteau. A genoux, elle tourna la pointe contre sa poitrine. Les dernières larmes qu’elle pourrait verser s’écoulèrent, réchauffant ses joues glacées. Elle serra les dents, mordant ses lèvres jusqu’à ce qu’elles en saignent. Ses yeux se fermèrent douloureusement. La pointe s’éloigna légèrement, pour mieux frapper...
- Maellen ! Non !
Elle ouvrit les yeux, laissant son geste en suspens. La lame lui glissa des doigts, retombant lourdement sur le sol. La voix lui était plus que familière. L'Avariel aux cheveux blancs et noirs éloigna le couteau d'un coup de pied. Il s’agenouilla à côté de son amie.
- Ce n’est pas la solution...
- Je les ai tués...
- Je n’y crois pas.
- Comment peux-tu dire ça ! Regarde autour de toi !
- Je te connais... Je n’y crois pas.
- Pourtant...
La jeune femme baissa les yeux. Elle aurait tellement voulu que tout ceci ne soit qu’un rêve. Mais elle était bien réveillée, elle le savait...
- Je ne veux plus vivre... Ils sont morts...
Le visage d’Aleki se tordit en un rictus douloureux. "Mais ne sais-tu pas qu’ils n’étaient pas les seuls à t’aimer ?" Il sentait les larmes lui venir aux yeux. Mais il ne dit rien. Tout ce qu’il ressentait depuis le premier jour ressortit à présent. "Tu n’es pas seule..." Non, elle n’était pas seule... C’était lui qui l’était... Il le serait tant qu’il ne lui dirait pas. Mais il ne pouvait pas... Il connaissait les sentiments de Maellen à son égard. Il ne voulait pas gâcher la relation qu’il entretenait, précieuse, avec elle. Il souffrait de ne pas faire cet aveu, si simple et si complexe, tout comme il souffrait de savoir ce qui arriverait s’il trouvait ce courage. Pourtant, à cet instant...
- Excuse-moi...
Il prit le couteau avec lui, et sortit en courant. Il ne voulait pas qu’elle voie ses larmes. Ces larmes d’amertume, de dégoût, qui, il le savait, démontrait son amour pour elle... Dans la rue déserte, il s’appuya contre un mur, se laissant glisser jusqu’au sol. Il laissa venir les gouttes salées. Malheureux de ne rien pouvoir pour sa compagne, furieux aussi... Mais cette colère s’estompa rapidement, comme disparaissant de lui. Ne lui restait alors que son désespoir...
- Imbécile.
Aleki leva les yeux, et ce qu'il vit n'était autre que... lui-même. Les yeux dorés fixaient les siens, rougeoyants. L'Avariel ne comprit pas ce que cela signifiait. Il se contenta de regarder son image, hébété.
- Tu es égoïste. N'entends-tu pas Maellen qui pleure tandis que tu te lamentes ? Aurais-tu oublié qu'elle a bien d'autres moyens d'attenter à sa vie pendant que je te l'explique ? Regarde-toi...
Et il se vit tel qu'il était. Comme s'il voyait aux travers des yeux de son double - mais n'était-il pas lui, après tout ? - il se vit, mi-assis, mi-accroupi, effondré, ses plumes d'un blanc presque doré en désordre, les yeux embués, regardant dans le vague... Misérable, pitoyable...
- ... pathétique...
Il ne put que baisser les yeux et approuver. Il savait que c'était ce qu'il ressentait lui-même... Sauf que ce "lui-même" s'était détaché de lui... Il connaissait avant même qu'ils ne soient prononcés les mots qui allaient sortir de la bouche de son ego. Car son esprit y faisait écho.
- Tu n'es qu'un lâche.
Maellen ne comprenait pas. Pourquoi était-il parti ? Elle avait dit cela pour montrer son grand besoin de réconfort. Et il était parti, sans comprendre... Pourtant, elle savait qu'au fond, ces paroles prononcées sans réfléchir reflétaient la stricte vérité. Ceux qu'elle aimait n'étaient plus, par sa faute. Sans eux, elle ne se sentait plus à sa place ici, ni même sur la terre. Aleki avait emporté le couteau, pensant éviter ainsi le risque qu'elle ne se fasse du mal. Mais au fur et à mesure qu'elle y pensait, cela s'éclairait, devenant une évidence. Elle ne méritait plus de vivre... Et elle regardait les deux corps entrelacés même dans la mort, avec pour seule envie de les rejoindre. Ses lèvres subirent encore la morsure de ses dents, qu'elle aurait voulu plus ferme, plus douloureuse. Cela ne la soulageait pas. Les larmes continuaient d'effleurer ses joues, malgré elle, elle ne les retenait pas.
Elle entendit des voix, dehors. Elle ne fit pas l'effort de les reconnaître. Elle se laissa tomber. Assise ainsi, entre ses jambes pliées, elle paraissait telle une petite fille, perdue. Pourtant, dans l'esprit de l'Avarielle, les choses étaient plus claires que jamais. Elle avait déjà pris sa décision, elle s'y tiendrait. Repliant ses ailes d'argent autour d'elle, elle ferma les yeux. Posant ses deux mains l'une contre l'autre devant sa poitrine, on aurait pu la croire en prière. Mais elle rassemblait ses forces, le peu qui lui restait d'énergie. Envoyée en un point précis de son corps, elle achèverait sa vie...
A genoux dans la poussière de la rue, Aleki regarda son autre lui entrer calmement dans la maison de Maellen. Il ne pouvait que le laisser faire. Comme il l'avait dit, comme lui-même l'avait ressenti, sa lâcheté l'empêcherait d'agir... Mais il avait confiance. Si son corps s'était divisé en deux moitiés, c'était sans doute pour une raison précise. Ici, certainement pour qu'il ose venir en aide à sa jeune amie... Il ferait ce qu'il faudrait... Et il se voyait en permanence spectateur et acteur. Chacun était étroitement lié à l'autre...
Il s'approcha d'elle comme d'un petit animal apeuré. Mais voyant Maellen prostrée, une flamme bleutée en train de se former entre ses mains, Aleki faillit perdre sa contenance. Il courut vers elle, et sépara vivement ses doigts, qu'il garda serrés entre les siens. L'énergie ainsi récoltée se dissémina de nouveau dans le corps de l'elfe, éloignant tout danger. "Du moins, dans l'immédiat." Les yeux dorés regardèrent Maellen avec une intensité qui lui fit détourner les siens.
- Tu veux vraiment mourir ?
L'enchanteresse ne dit rien. S'il posait la question, c'est qu'il connaissait déjà la réponse. Lâchant une de ses mains, il prit délicatement le menton de Maellen, et le tourna vers lui, la forçant à le regarder.
- Dis-moi pourquoi. Je ne comprends pas.
Maellen secoua la tête. Il le savait, alors pourquoi ainsi la tourmenter ?
- J'ai du sang sur les mains. J'ai tué ceux que j'aimais. Je ne mérite plus...
Aleki lui posa un doigt sur la bouche, l'empêchant de continuer.
- N'as-tu jamais pensé qu'ils n'étaient pas les seuls pour qui tu pouvais vivre ? Il y sans doute quelque part quelqu'un qui t'aime autant, si ce n'est plus, qu'eux, tu ne crois pas ?
- Comment quelqu'un pourrait-il m'aimer après ce que j'ai fait ?
- Réfléchis... L'amour ne se mérite pas. Il ne se déclare pas en fonction de tes actes. De même que la vie. Ne dis pas que tu ne mérites plus de vivre. Elle t'a choisie pour être ici, ne la détruis pas sans savoir... Car je ne mérite pas plus de vivre que toi...
Maellen détourna de nouveau la tête. Elle connaissait son passé. Que répondre à cela ? Mais ce n'était pas ainsi qu'elle le ressentait. Et y avait-il une personne au monde qui soit capable de lui faire changer d'avis ?
- Maellen, tu ne comprends pas...
Aleki secoua la tête. Il avait reproduit exactement la même erreur. Il n'avait pas été direct, espérant qu'elle saurait le reconnaître dans ses propos. Mais elle était trop aveuglée par son propre chagrin... Que fallait-il qu'il fasse pour qu'elle ouvre enfin les yeux ?
- Maellen...
Lâchant complètement ses mains, il la saisit par la taille et la souleva, pour la forcer à rester sur ses pieds. Elle ne se fit pas prier, mais ne le regardait toujours pas.
- Maellen, ce n'est pas ta faute...
Pas une réaction. Alors il la prit dans ses bras, comme le grand frère qu'elle voyait en lui. Doucement, il la berçait, pour la calmer, la rassurer. Il dégagea son visage de ses lourds cheveux noirs, espérant qu'elle lève les yeux.
- Maellen, que dois-je te dire... ?
Et soudain, comme si le fait de prononcer une énième fois son nom avait débloqué ses barrières, un torrent de larmes s'échappa de ses yeux, silencieux. Soulagé, Aleki la laissa se reposer sur son épaule. Elle avait besoin de réconfort, il était la pour lui en donner.
- Pleure tout ce que tu peux, si cela te fait du bien...
Il caressa ses cheveux, la sentant progressivement se détendre. Alors qu'elle avait le corps encore secoué de sanglots, elle leva les yeux vers lui, en un remerciement muet. Il l'embrassa sur le front, essuya les joues humides. Puis il posa sa main derrière sa tête, posant ses lèvres dans la chevelure abondante.
La détresse de la jeune Avarielle le touchait plus qu'il ne le pouvait penser... Cela fit ressortir un désir qu'il avait enfoui pour le bien de sa compagne...
Sa main glissa lentement le long de la soie de ses cheveux, continuant la caresse jusque dans son dos. Ses pleurs semblaient s'être calmés, elle ne réagit pas. Les doigts remontèrent lentement, jusqu'à atteindre la fine bretelle qu'ils firent descendre le long de l'épaule. Maellen recula la tête, les yeux vides.
- Je ne veux pas...
Aleki la fit taire d'un baiser. Elle sursauta, s'échappant de ses bras. Il la retint avant qu'elle ne tombe, elle le repoussa. Mais sans vigueur.
- Je ne veux pas...
Elle tomba. L'Avariel se pencha sur elle, un sourire bienveillant aux lèvres, le regard aimant. Elle recula, comme elle le pouvait. La bretelle de la fine robe de moire continuait son chemin sur le bras de la jeune femme. Elle ne le remarqua pas.
- Je ne veux pas...
Aleki l'avait rattrapée. Avant qu'elle n'ait pu résister, il la serrait dans ses bras, embrassant son visage et son cou avec beaucoup de douceur.
- Je ne veux pas...
C'était une créature sans force qu'il avait dans les bras. Elle répétait inlassablement cette phrase, mais ne pouvait rien pour empêcher son compagnon de succomber aveuglément à sa passion.
Son double le voyait. Plus il avançait, et plus Maellen était envahie par la peur. Il savait qu'elle ne comprenait pas le comportement de son ami, qu'elle se savait impuissante face à cet excès de zèle. Et lui pauvre spectateur ne pouvait que regarder la débâcle de sa confiance. Pouvait-il se raisonner lui-même ? Il pouvait toujours essayer... *Elle dit qu'elle ne veut pas...* Ce fut cette phrase, la seule que sa couardise lui permettait de prononcer, il le savait, qui provoqua la rupture. Car la réponse qu'il entendit fut la pire qu'il pût imaginer. Il la reçut comme une gifle. *Et alors ?* Etait-ce cette courte phrase, ou le sentiment de se retrouver seul dans son propre esprit qui le projeta en arrière ? Il ne le sut pas. Mais alors des larmes coulèrent de ses yeux devenus verts. Il comprenait que c'était lui qui modérait son ego. A présent, il n'avait plus aucun frein... Et il ne pouvait que regarder sa bien aimée subir ce qu'il n'aurait jamais souhaité à aucune femme... Et c'était lui-même qui... Il savait ne pas pouvoir intervenir, même si c'était ce qu'il souhaitait de tout son être... Car ils étaient deux, et cela ne se pouvait. Parce qu'il était lui, chaque moitié complémentaire de l'autre.
Les caresses se firent plus fougueuses, les baisers plus rudes. Il entendit à peine Maellen crier. Il avait été libéré de ses entraves, il était seul à présent à dicter les mouvements de son corps. Il se pencha sur l'elfe, à présent débarrassée de sa robe... Elle se recroquevilla sur elle-même, profitant du mince relâchement de l'emprise qu'il avait sur elle. Il la laissa aller, la regardant avec patience, comme un prédateur observe une proie qu'il a déjà capturée... Elle était nue, et ainsi à découvert, fragile et sans défense... Elle qui était habituellement si encline à provoquer innocemment le désir des hommes simplement par ses formes charmantes était devenue soudainement pudique... pour lui, songea-t-il... Il appréciait cela aussi. Il profitait de la vue qu'elle lui offrait... Tout cela... Elle n'en était que plus désirable. Mais il vit cette lueur effrayée dans ses yeux. Il ne comprit pas. Comment pouvait-elle avoir peur de lui ? Il avait toujours pris soin d'elle... Il décida que ce n'était qu'une illusion dûe à sa propre excitation. Elle avait fermé les yeux... Etait-elle résignée ? Lui pensait qu'elle s'offrait.
Mais lorsqu'il s'approcha de nouveau, sa volonté avait refait surface. Ses grands yeux noirs s'ouvrirent, et elle recula, nettement terrorisée. Cela le mit en colère. Elle buta contre quelque chose de mou, qui entravait sa fuite. Elle se retourna, et cria. Elle était coincée contre le corps de ses parents, et Aleki était trop proche... Elle n'avait plus le temps de partir, ni de tenter quoique ce soit contre lui... Il était sur elle... Elle cria encore, exprimant sa peur et son horreur, désespérant que quiconque ne l'entende...
- Aleki ! Je ne veux pas !
Aleki se bouchait les oreilles. Au seuil de la maison, il tremblait... Cela représentait toute la colère, la frustration, le désir que son entier retenait depuis si longtemps. Comment aller à son encontre ? Il regarda pourtant, témoin horrifié de ce dont lui-même était capable... Et il vit...
Aleki était au dessus de Maellen. Ses deux mains la plaquaient au sol, dans le sang des deux elfes égorgés. Elle était horrifiée, tétanisée. Ses cheveux y baignaient, lui laissant ce goût amer. Son corps nu était couvert de ce sang qui lui avait fait perdre le goût de vivre. Il semblait prendre encore plus de plaisir à voir ses yeux révéler le poids de sa culpabilité que la terreur qu'il lui infligeait. Ironiquement, c'était celui-là même qui l'avait convaincue de rester un peu plus longtemps de ce monde, qui était en train de lui faire regretter de l'avoir écouté. Elle avait cru que cet être infâme était son frère. Il était un monstre. Elle criait sa terreur alors qu'il en jouissait. Mais elle ne pouvait rien contre son bourreau. Trop fort pour elle, misérable petite créature ailée qui venait de perdre sa liberté. Il souriait de son impuissance, en profitant pour la couvrir de baisers immondes. Elle savait qu'elle ne pouvait rien. Elle pleura, et ne résista plus. Elle commençait à se résigner à son sort. Non pas par faiblesse, cette fois, mais étant impuissante contre ce qui lui arrivait, elle préférait éviter des souffrances inutiles... Mais Aleki sembla en prendre moins de plaisir. Sa réaction n'en fut que plus violente. Il la prit alors avec une brusquerie inhumaine, et le sang de l'Avarielle se mêla à celui de ses parents. Ses larmes redoublèrent, mais ce n'était autre que du sang qui coulait à présent le long de ses joues. Maellen ferma les yeux, supportant tous les assauts sans plus un mot. Pourtant, la douleur l'assaillait de toute part. Même ses ailes protestaient. Coincées sous le corps immobilisé de la magicienne, leurs os fragiles craquaient un peu plus à chaque à-coup.
Aleki pleurait, ne pouvant détacher son regard du terrible spectacle qui s'offrait à lui... Il regretta sa lâcheté, mais il regretta aussi d'en souffrir : car sans cette culpabilité, elle n'aurait pas connu cela, même si elle n'aurait plus été de ce monde. Elle aurait préféré, mais elle n'avait pas réellement eu le choix...
Puis tout s'arrêta. Maellen sentit le corps d'Aleki quitter le sien, lui laissant pour tout linceul son propre sang et un courant d'air. Elle ouvrit une dernière fois les yeux : il la regardait. Sans cruauté, mais sans amour. Il la regardait. De ses yeux froids. Rouges comme le sang qu'ils avaient chacun leur tour fait couler. Puis elle sombra dans de bienheureuses ténèbres.
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