Cauchemar ◊ Mark

Anonymous
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Lun 22 Fév - 20:36
Il était parti chercher Watson avec Mark. Encore. Il avait quitté la base pour s'aventurer dans la plaine à la recherche du cyantifique disparu. Liam était resté sur place après avoir croisé un dessinateur blond à la mine joviale... Quand le regard des deux hommes s'était croisé, il lui avait semblé pendant un court instant que Liam avait réagi. Ils devaient se connaître... L'attitude de l'inconnu ne laissait aucun doute là-dessus.

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.


Il avait un air de poésie en tête. Quelques vers qui lui trottaient inlassablement dans la tête et il ne parvenait pas à les faire sortir de son esprit. Ça, c'était forcément la faute d'Euclide. Depuis qu'il avait feuilleté les Contemplations, des fragments de poèmes rejaillissaient soudainement de sa mémoire. Il ne pensait pourtant pas en avoir mémorisé autant... Venaient-ils vraiment de lui ?

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.


Une forme trouble se profilait à l'horizon. Une silhouette étendue au loin. Il haussa les sourcils, perplexe. La plaine était pourtant loin d'être l'endroit le plus sécurisé qu'il soit. Quitte à se reposer ou contempler le ciel, autant le faire en ville... Elle n'était qu'à quelques pas d'ici, et les objets y étaient bien moins fréquent. Ne devraient-ils pas aller lui signaler qu'il se mettait en danger ? Ils étaient peut-être face à un nouveau venu...

Mais alors qu'il s'approchait, son cœur fit un bond.
Cette silhouette paraissait bien trop familière.
Ces cheveux bien trop blancs.

Il se figea.
Quelque chose remuait au fond de ses entrailles.

C'était impossible. Cela ne pouvait pas être lui. Il l'avait cherché trop longtemps pour qu'il ne puisse le retrouver ainsi. Mark l'avait vu la veille. Il ne pouvait pas avoir... Non. Il ne s'était déroulé qu'une journée... Une simple journée. Il n'y avait aucun risque qu'il se produise quoi que ce soit en si peu de temps, n'est-ce pas ?

Le malaise grandissait et le rongeait de l'intérieur.

Le teint de son frère n'était-il pas encore plus pâle qu'à l'ordinaire ? Son expression était glacée et son regard éteint. C'était probablement la fatigue... Un rhume, une grippe ou n'importe laquelle de ces maladies étranges si courantes dans l'Esquisse... Thalès ne pouvait pas... Il ne pouvait pas finir comme cela... Il allait probablement ouvrir les yeux d'une minute à l'autre, se réveiller, faire un geste, le fuir, même, comme il le faisait depuis tout ce temps... Mais certainement pas...

Au milieu de la plaine, Pythagore s'effondre.

Il ne connaissait que trop bien les derniers vers du poème.
Anonymous
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Sam 27 Fév - 23:09
La Plaine. Vaste étendue de mystères et dangers en tous genres. Plus que dans n'importe quel lieu de l'Esquisse, on était susceptible d'y vivre des instants inattendus. C'était précisément pour cette raison que Pythagore avait proposé d'y aller chercher Watson.
Mark avait râlé. Aller risquer sa vie dans un pré géant ? Merci bien. Mais il préférait encore chercher l'aiguille dans la botte de foin qu'était Watson plutôt que de rester seul. Sans Pythagore. Il avait donc pris son mal en patience et avait suivi le mouvement. Liam avait docilement suivi, mais avait fini par les lâcher en cours de route, Mark n'avait pas vraiment remarqué à quel moment. Peu importe.
Pythagore en tête, ils avaient marché pendant de longues minutes, peut-être deux heures. Peut-être moins. A force de voir de l'herbe, Mark en perdait la notion du temps. Il avaient vaguement été attaqués à deux reprises, mais rien à quoi ils n'aient pu échapper par la forces de leurs jambes... Et selon Pythagore, c'était anormal -dans un sens positif- qu'ils aient subi aussi peu d'agressions d'objets. Une belle journée en perspective, donc. Il n'aurait plus manqué qu'ils trouvent Watson et tout aurait pu être parfait.
Tout aurait pu, oui.
Seulement, ce n'est pas Watson qu'ils avaient trouvé.


Dans la Plaine, plus que dans n'importe quel lieu de l'Esquisse, on était susceptible de vivre des instants inattendus... En effet, Mark ne s'était pas attendu à cela. Personne n'aurait pu s'y attendre. Sauf peut-être Pythagore, qui était déjà hanté par cette perspective depuis bien longtemps. Cela ne l'avait pas empêché de ployer sous le choc.
Tout d'abord, Mark ne réalisa pas. Il voyait ce corps immobile, ce visage froid aux yeux fermés, il reconnaissait et ne reconnaissait pas cet homme. C'était Thalès, et ce n'était pas lui. Thalès n'était pas aussi... Il était... Il était vivant. Il aurait dû être vivant. Mark ne l'avait jamais vu que vivant, comment aurait-il pu le reconnaître mort ? Mais lorsque Pythagore tomba à genoux devant le corps sans vie de son frère, Mark sentit son cœur tomber au fond, tout au fond du gouffre.
Comment aurait-il réagi ? Comment aurait-il survécu ? Si Ervin, et non Thalès, s'était trouvé là, comme une marionnette aux fils coupés ? La simple pensée lui inspira une bouffée de peur incontrôlable. Il eut soudain l'impression absurde qu'Ervin était peut-être en danger, en ce moment, qu'il allait le retrouver, lui aussi, allongé au sol, comme endormi, avec la peau beaucoup trop froide. Il eut soudain l'envie irrépressible de courir vers la ville, de rentrer au Manoir, juste pour vérifier que son frère était toujours lui-même, qu'il n'était pas devenu une poupée de cire insupportablement immobile. Et cette simple pensée, cette simple idée, cette simple envie, faillirent l'emporter dans un flots de pensées et de peurs aussi irrationnelles qu'incontrôlables.
Il s'administra une claque mentale et se força à chasser ces pensées de son esprit. Ervin allait bien. Il n'y avait aucune raison pour qu'il aille mal. Il était en sécurité au Manoir. Il n'avait pas besoin de lui. Pythagore avait besoin de lui.
Le plus calmement possible, il vint s'agenouiller auprès de Pythagore, devant Thalès. Lentement, doucement, il tendit la main et saisit le poignet du jeune homme aux cheveux blancs.
...
Aucun pouls.
La main tremblante il le lâcha. A quoi s'attendait-il ? L'Esquisse, il l'avait déjà pressenti mais il en avait à présent la confirmation, ne faisait pas de cadeau. Jamais.
Anonymous
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Dim 28 Fév - 23:40
Les mots, les phrases, les images, les sons... Tout était flou. Confus. Brouillé. Haché.
Il n'y avait plus que Thalès.
Il ne distinguait que ce corps pâle. Blême. Exsangue.

Mort ?

Non... Ce qu'il avait sous les yeux ne pouvait pas être… Il refusait de l'admettre. Il ne pouvait pas l'accepter. Thalès... Non, Théo ne pouvait pas être mort. Pas après avoir survécu à l'Esquisse pendant aussi longtemps. Pas après avoir résisté à la tempête, aux objets, à ce monde qui les retenaient… Son frère était fort, bien plus fort que lui. Il n'avait pas pu… Cela ne pouvait pas être lui. Oui… C'était peut-être son corps, mais ce n'était pas vraiment lui. C'était la seule explication possible. Quelqu'un avait sûrement récupéré le corps de son frère au cours d'une tempête… La personne qu'il avait devant lui ne pouvait tout simplement pas être Théo. Théo était  bien vivant, quelque part… Avec les cyantifiques, peut-être ? Ils se déplaçaient souvent en groupe, ils ne l'auraient pas laissé s'aventurer seul dans la plaine… Mais Mark l'avait aperçu la veille. Seul.

Alors… Peut-être était-il juste assoupi ? Peut-être était-il simplement inconscient ? Il avait besoin de se raccrocher à quelque chose. Quelqu'un. N'importe quoi. La simple possibilité que son frère soit en vie lui aurait suffit. Une probabilité, aussi infime soit-elle, représentait toujours un espoir…

Ah… De l'espoir... Ce monde ne l'avait-il pas suffisamment fait espérer ? Il était resté sans nouvelles pendant des jours, il avait douté, s'était imaginé le pire. Et c'était lorsqu'il obtenait enfin la certitude que Théo était vivant le jour précédent que…

Au diable l'ironie de ce monde.
Foutue Esquisse.


Il avait envie de hurler mais les larmes, les cris ne venaient pas.
Que ressentait-il actuellement ? De la rage ? Du désespoir ?
Ces noms d'émotions semblaient bien plats.
Quelque chose brûlait au fond de sa poitrine.
Quelque chose lacérait son cœur.

Pourquoi ? Pourquoi lui ?

Son regard s'assombrit.

Il aurait mieux valu que cela soit moi.
Je n'aurais manqué à personne.


Les pensées, les souvenirs et les regrets défilaient dans son esprit.
Il était trop tard.
Anonymous
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Mar 1 Mar - 16:57
Mark détourna son regard du cad... de Thalès et se tourna vers Pythagore. Hésitant, il tendit la main et la posa doucement sur son épaule, avec beaucoup de précautions, comme s'il craignait de le briser comme du cristal.
Il ouvrit la bouche ; la referma. Que pouvait-il dire, de toutes façons ? Il n'y avait rien à dire. Juste à être là.
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Dim 6 Mar - 21:46
Il tressaillit, surpris par la main qui venait de se poser sur son épaule. Il frissonna. Cela n'allait pas. Cette main n'aurait pas dû bouger. Il n'aurait pas dû sursauter de cette manière, il n'aurait pas dû être capable de se mouvoir. C'était absurde, mais il ne parvenait pas à réaliser que le temps continuait de s'écouler. Le reste du monde continuerait d'évoluer, mais pourtant, le corps de son frère resterait à jamais inanimé… Pourquoi n'était-il pas resté lui-même figé ? Pourquoi parvenait-il encore à bouger ? Il ne le méritait pas… Il n'était pas censé être debout lorsque son frère était à terre. Il avait toujours pensé que si l'en d'entre eux disparaissait, alors…

Il pivota légèrement, se tourna vers ce regard ocre qui semblait presque aussi désemparé que le sien. Que lui restait-il, maintenant ? Il ne pouvait plus se raccrocher à ce mince espoir qui l'avait maintenu en vie jusqu'alors. Toutes ses illusions venaient de voler en éclats. Il ne pourrait plus jamais revoir Théo. Il ne pourrait plus jamais s'excuser, lui dire à quel point il était désolé, à quel point il avait été pitoyable… Il ne pourrait plus jamais entendre sa voix, observer l'allure familière de cette silhouette identique à lui-même. Il ne pourrait se surprendre à rêve d'une vie normale après l'Esquisse, prétendre qu'il parviendrait à sortir de ce monde et à mettre fin à ce cauchemar.

Une larme roula silencieusement le long de sa joue.

Ça fait mal. Plus qu'il ne peut le supporter.

Il détourna les yeux de Mark. Il n'avait rien à dire. Il n'avait rien à ajouter. Les mots, les paroles lui semblaient futiles. Les mots ne ramenaient pas les morts à la vie. Les paroles ne lui ramèneraient pas son frère. Il n'avait personne vers qui se tourner, rien qui pourrait lui venir en aide. Cette bataille était déjà perdue d'avance… Il ne pouvait pas lutter. Il avait perdu. Elle avait gagné. C'était aussi simple que cela. Son monde avait été balayé, son frère lui avait été arraché…

À quand viendrait son tour ?

Il se pencha pour saisir la main de Théo.
Il n'avait plus le courage de se relever.

À quoi bon continuer ?
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Sam 12 Mar - 21:30
Il avait la langue pâteuse, la poitrine comme comprimée, et la tête lourde. Mark ignorait que le désespoir ressemblait à une bête maladie. Il s'était toujours imaginé quelque chose de plus grandiose. C'était aussi banal que cela. Le désespoir était une maladie, une maladie contagieuse. Lorsqu'il vit les doigts de Pythagore s'enrouler autour de ceux, inertes, de son frère, lorsqu'il vit une larme lui échapper, lorsqu'il vit sa tête se baisser, Mark sentit l'envie irrépressible de le serrer dans ses bras. Il la réprima, pourtant.

« Pythagore... »

Sa voix était rauque. A ce moment, Mark réalisa qu'il pleurait. Il essuya son visage. Que pouvait-on dire, dans ce genre de cas ? "Je suis désolé" ? "Tout ira bien" ? L'un sonnait creux, et l'autre faux. Que pouvait-on dire à quelqu'un dont le monde s'écroule ? Comment empêchait-on un monde de s'écrouler ? Le pouvait-on seulement ?

« Je... suis là, d'accord ? Et je reste avec toi. Quoi qu'il arrive. »

Il prit l'autre main de Pythagore et la serra. Il était là. Il ne le laisserait pas tomber. Il était là...
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Dim 13 Mar - 0:40
Il tremblait. La main de son frère était glacée.
Lui aussi avait froid… Et il était si fatigué…
Il aurait bien aimé rejoindre Théo dans son sommeil…
Au moins, ils auraient été réunis…
Il était en proie à une étrange torpeur…
Le fil de ses pensées était…
Décousu ?
Était-ce un rêve ? Un cauchemar ?
L'Esquisse ? La réalité ?

Tu crois que ça fait quoi de se trouver seul au bord du gouffre, Pythagore ?

Son frère avait raison depuis le début.
À trop vouloir s'approcher du bord du gouffre, on ne peut que se blesser.

Il ferma les yeux.

« Pythagore… »

Un murmure… Et une pression familière exercée sur sa main.
C'était chaud.

Mark.

« Je... suis là, d'accord ? Et je reste avec toi. Quoi qu'il arrive. »

Mark était toujours là.
Quoiqu'il arrive ?
Il avait dû faire une promesse de ce genre à Thalès, il y a longtemps…
Devait-il aussi le suivre, quoiqu'il arrive ?

Il n'avait plus envie de rien.
Il lui serait facile de sombrer à son tour…
Mais était-ce la bonne solution ?
Mettre un terme à son existence…
N'être qu'un cadavre de plus.

J'ai envie de mourir…
Une phrase qui se dessine du bout des lèvres.
Un murmure presque inaudible.

« Laisse-moi… »
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Dim 13 Mar - 1:01
La phrase de Pythagore glaça Mark. Le sentiment qui s'empara de lui était un mélange de peur et d'angoisse. La peur d'être inutile. L'angoisse d'être rejeté. Les pensées se bousculèrent dans sa tête, comme si la tempête faisait rage sous son crâne. Il avait peur, peur pour Pythagore, peur de ce que Pythagore pourrait faire. Mais surtout, il avait mal, désespérément mal. Le sentiment d'impuissance s'infiltrait sous sa peau, dans ses muscles, ses veines, ses os.
Dans un même temps, il sentit comme une chaleur insupportable se répandre dans sa poitrine. Il serra les dents. Pythagore n'avait pas le droit de dire ça. Pas après... Après... tout ça !
Mark le prit par les épaules et, sans la moindre douceur, le força à lui faire face, plaça son visage à quelque centimètres de celui du rouquin pour s'assurer qu'il le regardait.
Le regard dur, les dents serrées, il cracha ces mots :

« Je t'interdis de faire quoi que ce soit de stupide, stupide roux. Je reste que tu le veuilles ou non, ne serait-ce que pour t'empêcher de faire une connerie. »
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Dim 13 Mar - 1:37
Les mains de Mark vinrent se resserrer autour de ses épaules et il se sentit tiré brutalement vers l'arrière. Deux iris ocres le fixaient d'un air accusateur. Un regard froid difficilement soutenable… Mais il était à des lieux du malaise dans lequel le plongeaient les paupières closes de son frère.

Mais Mark ne comprenait pas. Il ne pouvait pas comprendre. Ce n'était pas une chose stupide. C'était juste une manière d'en finir un peu plus vite, d'abréger ses souffrances… Il ne se sentait pas capable de vivre sans Théo, de continuer tranquillement sa vie tout en sachant que la sienne s'était déjà achevée… Non, il n'en avait pas la force. De toute façon, il était inutile de lutter contre Elle.

Il répondit dans un souffle, le regard suppliant.

« Mark… Laisse-moi… »

Tous les gens qu'il avait côtoyés dans l'Esquisse avait souffert… Théo, John, tous les patients de l'hôpital… Il n'avait pas besoin que le nom de Mark ne vienne s'ajouter en bout de liste. Mieux valait qu'il reste seul. Qu'il en finisse seul.

Il le répéterait autant de fois qu'il le faudrait.
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Sam 26 Mar - 23:06
Un prof de philosophie de Mark avait un jour affirmé que la philosophie était la seule matière scolaire qui pouvait servir à n'importe quel moment de la vie.
Mais que pouvait-elle face à la mort ?
Pour Epicure, il n'y a pas à craindre la mort, car elle signifie la cessation de toute existence. Mais dans le cas de la mort d'autrui ? Peut-être était-ce cela, que Pythagore recherchait. La cessation de toute existence. La cessation de toute douleur. Mark pouvait le comprendre. Mais c'était un cercle vicieux. Si Pythagore cessait d'être, tous ceux qui l'aimaient ne seraient-ils pas, eux aussi, tentés par une disparition pure et simple de ce monde ? C'était sans issue. Cela ne résoudrait rien. Rien du tout.
Mais plus que cette frustration, ou encore la tristesse, c'était la colère qui guidait à présent ses pensées.
Le monde de Pythagore tournait autour de Thalès. Il avait vécu pour lui, et maintenant il voulait mourir pour lui. Et Mark avait été incapable de changer cela.
Colère envers Pythagore, colère envers lui-même.

Espèce d'égoïste.

Et maintenant ? Si même la colère était vaine face à la mort, que restait-il ? Rien.
Mark lâcha Pythagore.

« Tu n'as pas le droit de me laisser. Pas comme ça. »
Anonymous
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Dim 27 Mar - 0:06
Mark relâcha sa prise et Pythagore détourna de nouveau les yeux. Il ne voulait pas que Mark le dévisage de cette manière. Il n'aurait pas dû le voir ainsi. Il n'aurait pas dû lui proposer de l'accompagner. Il aurait dû rester seul. Mark l'aurait simplement oublié. Tous l'auraient oublié. Il aurait disparu de ce monde dans l'indifférence, comme beaucoup d'autres avant lui.

Que disait-il ? Il n'avait pas le droit de le laisser ?
Mais qu'attendait-il de lui ?
Un ami, un compagnon ? De l'aide, du soutien ?
Inutile. Il ne lui apporterait rien de tout cela.
Parce qu'ici il s'appelait Pythagore et que son existence n'avait jamais rien apporté à quiconque.

Il ne cèderait pas.
Mark n'avait pas besoin de lui. Il avait encore des gens vers qui se tourner.

« Laisse-moi… Va plutôt retrouver ton frère… Le tien est toujours vie… »

Alors va-t'en. Ne gaspille pas ton temps ici.
Anonymous
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Lun 4 Avr - 19:13
« Laisse-moi… Va plutôt retrouver ton frère… Le tien est toujours vie… »

Mark repoussa la colère tout au fond de lui. La colère ne marchait pas. Que restait-il donc ?

« Non, écoute, Pythagore, j'ai besoin de toi. Quoi que tu dises, quoi que tu en penses, c'est vrai. »

Ça ne suffirait pas. Ça ne suffirait pas, n'est-ce pas ?
Mark se força à aller puiser les mots tout au fond, à côté de la colère. Juste à côté, mais pas trop près non plus.

« Qu'est-ce que tu crois que ça me ferait, que tu meures ? Tu crois que ça arrangerait quoi que ce soit ? Tu crois que tu seras utile à quelqu'un, en étant mort ? Alors que si tu restes... Si tu restes avec moi, tu pourras au moins m'aider, moi. J'ai besoin que tu m'aides. Vraiment. S'il-te-plaît. »

Ça faisait mal. Arracher les mots, comme ça, du fond de son âme, ça faisait mal. Mais il le fallait, non ?

« Si Thalès t'avait... retrouvé mort, tu crois que tu aurais eu envie qu'il se tue à son tour ? Tu n'aurais pas eu envie qu'il continue de vive malgré tout ? »

Même à lui, ça lui semblait affreusement cliché. C'était tout ce qu'il avait trouvé.
Anonymous
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Lun 4 Avr - 20:22
Il se sentait si las. Il était fatigué de lutter contre l'Esquisse, fatigué de débattre avec lui-même quant à l'utilité de sa propre existence, fatigué de devoir repousser Mark pour pouvoir en finir.

Il haussa négligemment les épaules devant son discours. Il doutait que quelqu'un ait un jour besoin de lui. Cela ne faisait que deux jours qu'ils se connaissaient. Il pourrait très bien se passer de lui et continuer de vivre comme durant toutes ces années…

Qu'est-ce que tu crois que ça me ferait, que tu meures ?

Il n'y avait même pas songé. Il ne pensait pas que sa mort ne puise-t-être autre chose qu'un soulagement pour quiconque… Pourtant… Depuis tout à l'heure, il essayait de le retenir ? Ne risquait-il pas de le blesser à son tour, quoiqu'il fasse ? S'il disparaissait… S'il restait… Dans les deux cas, Mark ne se retrouvait-il pas perdant ? Ne devait-il pas essayer de couper les liens ? Mais cela ne risquait-il pas aussi d'être douloureux pour lui ?

Tu crois que tu seras utile à quelqu'un, en étant mort ?

Pas plus que de son vivant, certes… Mais au moins, il ne risquerait pas de mettre en danger quelqu'un une fois mort.

Si tu restes avec moi, tu pourras au moins m'aider, moi. J'ai besoin que tu m'aides. Vraiment. S'il-te-plaît.

L'aider ? Il avait besoin de son aide ? Il avait du mal à y croire… Mais la voix de Mark, ce ton implorant tendaient à le persuader du contraire. Que pouvait-il bien lui répondre ? Il ne se sentait plus la force de protester.

« Si Thalès t'avait... retrouvé mort, tu crois que tu aurais eu envie qu'il se tue à son tour ? Tu n'aurais pas eu envie qu'il continue de vivre malgré tout ? »

Il n'avait pas envie de parler en hypothèses. Si Thalès, encore vivant, l'avait retrouvé mort ? Il aurait largement préféré cette issue. Mais les faits étaient là. Quant à savoir comment son frère jumeau aurait réagi, comment lui aurait aurait réagi… Il l'ignorait. Mais peu importait.

« Je ne pense pas que j'aurais eu un avis sur la question… Puisque j'aurais été mort. »

Il croisa le regard de Mark et se mordit les lèvres, honteux de lui-même.

« Excuse-moi, je… Je voudrais juste… Être seul. »

Juste ça. Juste être seul.

« Et… Tu ne devrais pas tenter de me raisonner… »

Il ne voulait plus être raisonnable.

« Tu ne devrais même pas passer autant de temps à me parler… Honnêtement… Je n'en vaux pas la peine. Quoique tu dises… Quoique tu penses… De toute façon… Tu ne me connais pas assez pour juger… Je n'ai jamais réussi à aider personne… Pas même mon frère… Alors je ne vois pas comment je pourrais… T'aider… »

Pitoyable. Il était pitoyable. Incapable d'aligner plus de deux idées sensées à la fois. Incapable de trouver les mots. Incapable.
Anonymous
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Jeu 14 Avr - 18:53
« Je ne pense pas que j'aurais eu un avis sur la question… Puisque j'aurais été mort. »

Tu ne comprends pas.

« Excuse-moi, je… Je voudrais juste… Être seul. »

S'il-te-plaît.

« Et… Tu ne devrais pas tenter de me raisonner… »

Ecoute-moi. Ecoute-moi vraiment. Au lieu de te contenter d'entendre...

« Tu ne devrais même pas passer autant de temps à me parler… Honnêtement… Je n'en vaux pas la peine. Quoique tu dises… Quoique tu penses… De toute façon… Tu ne me connais pas assez pour juger… Je n'ai jamais réussi à aider personne… Pas même mon frère… Alors je ne vois pas comment je pourrais… T'aider… »

Pourquoi tu ne m'écoutes pas ? Pourquoi tu continues de te laisser glisser sur cette pente, alors que je te tends une main ? Pourquoi tu ne prends pas cette main ?

« Je me fiche que tu n'en vailles pas la peine. Je m'en fiche si je perds mon temps. Je me fiche de ne pas te connaître assez, et si tu ne veux pas que je te juge, je ne te jugerai plus. Je me fiche que tu n'aies réussi à aider personne, et je ne te demande pas de m'aider. Je n'ai pas besoin d'aide. J'ai juste besoin de toi. Que tu sois là. Tu n'as pas besoin de faire quoi que ce soit. Tu n'as pas besoin de dire quoi que ce soit. »

Mais s'il-te-plaît.

« Si je te laisse seul, tu vas disparaître de ma vie. Et ça, je ne le veux pas. Tu as mis des couleurs dans ma vie. Si tu n'es plus avec moi, tout redeviendra gris. S'il-te-plaît. Ne disparais pas. »

Ne disparais pas.
Anonymous
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Ven 15 Avr - 17:05
Il n'aurait pas dû lui porter autant d'attention. Il ne la méritait pas. Il ne méritait pas de telles paroles. Il ne méritait pas qu'on le soutienne. Pourtant… Mark était là. Et Mark, malgré toutes ses tentatives pour le décourage, continuait. Persistait à vouloir l'éloigner du gouffre.

Était-il si important à ses yeux ?

Il ne voulait pas causer plus de soucis. Il en avait déjà créés suffisamment… Il ne voulait pas que Mark souffre… La douleur de perdre un être cher… Il ne la connaissait que trop bien. Et il ne la souhaitait à personne.

« Si je te laisse seul, tu vas disparaître de ma vie. Et ça, je ne le veux pas. Tu as mis des couleurs dans ma vie. Si tu n'es plus avec moi, tout redeviendra gris. S'il-te-plaît. Ne disparais pas. »

Il releva timidement la tête et croisa son regard.

Alors c'était pour ça…
Pourquoi ne l'avait-il pas réalisé plus tôt ?
Après tout ce temps, il était toujours aveugle aux sentiments des autres…


« Pardon… Je ne pensais pas que… »

Il n'acheva pas sa phrase. Mark ne se souciait probablement guère de ses excuses. Il n'était bon qu'à ça, s'excuser. Culpabiliser. Essayer de se faire pardonner une fois l'erreur commise.

« Je… Je ne disparaîtrai pas. »

… si c'était ce qu'il souhait.

Il fit une pause.

« Mais, maintenant… »

Mais maintenant que Thalès avait disparu…

« Dis-moi… »

Son existence avait-elle encore du sens ?

« Que dois-je faire ? »
Anonymous
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Ven 15 Avr - 17:44
« Pardon… Je ne pensais pas que… »

Mark ne put s'empêcher de rougir. Il avait beau avoir tout fait pour qu'il comprenne, il était presque sûr que Pythagore passerait encore à côté de la vérité. Mais il avait réussi à le faire réagir. Enfin.

« Je… Je ne disparaîtrai pas. »

Promesse ou vérité énoncée ? Mark ignorait si Pythagore tiendrait réellement le coup. Mais il voulait y croire. Il était prêt à tout pour l'aider à continuer. Continuer à vivre.

« Mais, maintenant… Dis-moi… Que dois-je faire ? »

Que faire ? Que faire. Mark l'ignorait. Il fallait peut-être simplement continuer d'avancer. Avancer pour ne pas reculer, et pour ne pas tomber.
Mais avant...

« Il faudrait peut-être... L'enterrer, je pense... »

Il était inutile de donner un nom. L'enterrer par respect. Et l'enterrer pour mieux dépasser sa disparition. Mark sentait que c'était probablement important.

« Si tu le souhaites. »
Anonymous
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Ven 15 Avr - 21:57
L'enterrer.
Enterrer Thalès.
Creuser une tombe.
L'enterrer.


« Je… Je suppose que c'est la meilleure chose à faire, oui… »

Seulement, il ignorait s'il en était capable.
Se relever lui paraissait déjà si difficile…
Tourner la page serait insurmontable.

« On ne peut pas… Le laisser comme ça. »

Thalès, devant lui, avait l'air simplement endormi, tranquille. Et lui, Pythagore, ne pouvait plus rien faire pour le réveiller. Il ne pouvait que l'observer. Contempler le corps sans vie de son frère. Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Pythagore se releva péniblement. Son corps entier était secoué de tremblements. Ses jambes semblaient prêtes à céder à n'importe quel moment.

Il ne pourrait pas.
Il n'en aurait pas la force.
Anonymous
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Lun 18 Avr - 21:28
Pendant un moment, Mark crut sincèrement que Pythagore n'allait pas répondre. Mais il finit par ouvrir la bouche et lâcher quelques mots.

« Je… Je suppose que c'est la meilleure chose à faire, oui… »

Il ne voulait pas le brusquer, mais ils ne pouvaient pas décemment laisser Thalès ainsi...

« On ne peut pas… Le laisser comme ça. »

Pythagore, cependant, ne bougea pas. Il avait l'air tellement perdu que Mark doutait presque d'être capable de l'aider à retrouver son chemin.
Alors pour le moment, il se contenta de lui prendre la main sans rien dire.
En attendant.
Anonymous
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Lun 18 Avr - 21:43
Il sentit la main de Mark venir se glisser dans la sienne et rougit légèrement. Pendant quelques secondes, ses tremblements cessèrent. Il ne pouvait pas se permettre de disparaître à son tour. Il n'aurait peut-être pas la force de se relever, il n'aurait peut-être pas le courage de continuer… Mais quoiqu'il arrive, il n'était pas seul..
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