[Passage J25] Mémoires de famille

Stilgar
Petit pimousse au rapport !
Personnages : Crevette, Rosalina Ngwenya, Amundsen, Agate Withcroft-Molina, Langouste, Crevette des Câbles
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Date d'inscription : 07/01/2019
Stilgar
Dim 10 Avr - 3:45
HRP :

__–Le groupe s’installait dans les dortoirs. Rosalina prenait le premier tour de garde. Après une dernière ronde dans les couloirs de l’étage pour s’assurer qu’aucune saloperie ne grouillait dans les environs, Crevette rejoignit l’intérieur. Sitôt entrée, elle chercha des yeux Langouste. Recroquevillée dans un coin à côté de son étrange ami tout blanc, elle serrait son nounours tricolore. Elle observa le visage de cet étrange adulte. Il lui était familier. Ce qui n’était pas normal. N’avait-elle pas aucun souvenir de la Terre ? Son identité s’était en partie reconstruite là-dessus. Elle était Crevette, un nom minable, mais qui était devenu son nom de guerre. Elle s’était désormais faite connaître dans le groupe comme celle qu’il ne fallait pas emmerder, celle qui était armée, une des seules qui pouvaient faire quelque chose de ses dix doigts, celle qui te  gueulait dessus quand elle en avait envie, si elle en avait envie, peu importe si tu faisait soixante centimètres de plus qu’elle.
__–Finalement, avait-elle vraiment envie de pousser plus loin la réflexion que ce Dessinateur incongru lui proposait, cet… enfant dans un corps d’adulte ?
__–Elle s’approcha de lui. Lui secoua l’épaule.
__–« Viens. Il faut qu’on parle.
__–Gné… ? Naaan, je veux dormiiiir…
__–Arrête, tu fais semblant et ça se voit. »
__–Crevette se pencha sur Langouste, jusqu’à ce que son souffle pût être sentie sur sole visage de l’enfant-adulte :
__–« T’as peur, pas vrai ? T’es terrifiée par ce qui t’arrives parce que t’y bites que dalle ? Alors bouge ton gros cul fissa, parce que j’ai peut-être des réponses comme t’en as pour moi. »
__–Et sa peur de l’environnement étant devenue inférieure à celle que suscitait Crevette, Langouste se leva et la suivit, autant recroquevillée sur elle-même qu’elle le pouvait.

__–Crevette l’emmena au salon, où elles purent s’asseoir pour discuter. Crevette ne décrochait pas son regard du visage de Langouste, qui elle était bien trop craintive pour oser affronter celui de cette petite fille si autoritaire.
__–« T’as quel souvenir de la Terre ?
__–Euh… »
__–En vérité, le concept même de « Terre » était assez neuf pour Langouste : elle avait tout juste appris qu’elle venait en fait d’un autre monde – cela, elle avait pu le deviner toute seule – et que lors de son arrivée dans l’Esquisse, elle avait perdu la mémoire et que son corps n’était plus le sien – cela aussi, elle l’avait deviné.
__–« Alors ?
__–Baaah euuuh… Je sais pas…
__–Est-ce que tu sais quelque chose ?
__–Pourquoi t’es méchante avec moi… »
__–Crevette s’agaça, s’apprêta à s’énerver, mais souffla longuement. Essaya de se rappeler de ce qui disait Effie. Passa sa main sur son visage.
__–« Okay, bon. Comment tu t’appelles ?
__–Je sais pas…
__–Ta peluche, là. Elle vient d’où ?
__–Je sais pas… je l’avais avec moi et c’est tout.
__–T’as quoi d’autre ?
__–J’ai ça. »
__–Elle lui montra ses petits pots de confiture. Crevette se leva de son siège pour les inspecter. Langouste, elle, n’avait d’yeux que pour le fourreau du sabre. Elle le frôla. Crevette eut un mouvement de recul.
__–« Tu fais quoi là ? »
__–Langouste lui tendit son ours.
__–« On échange ? »
__–Il fallut du temps pour que la requête entrasse dans son cerveau, mais Crevette détacha sa ceinture. Lui tendit son arme.
__–« T’es droitière ou gauchère ?
__–Euh… Gauchère je crois ?
__–Alors accroche-le à ton côté droit. Voilà, comme ça. Mets ta main dessus. Non, à l’envers, sinon tu ne vas pas pouvoir le tirer. Okay, dégaine. Lentement, j’ai pas envie que tu me découpes. Tend-le devant toi. Fais voir ta main ? Non, plus ferme là. Voilà. Essaie un moulinet ? Mm. Okay.
__–Tiens. »
__–Crevette prit la peluche. L’observa sous tous ses angles et le regard attentif de sa propriétaire.
__–« Non, il faut la tenir contre soi. Prend-la dans tes deux mains. Colle-la contre toi. Comme ça. ’faut que ce soit chaud contre ton cou. »
__–Elles n’avaient jamais fait ces gestes. Elles n’avaient jamais entendu ces explications. Mais elles avaient vu quelqu’un les faire. De cette exacte manière. Avec ce même corps. Ce petit corps fluet agrippé à sa peluche. Ce grand corps fort faisant siffler le vent de la pointe de son arme. Elles regardèrent.
__–« … Papa ? »
__–Quoi ?
__–J’ai une fille, moi ?
__–Je ressemble à ça sur Terre ?
__–Elle ressemble à ça sur Terre ?
__–J’ai une fille, moi ?
__–Crevette s’assit. Posa la peluche – ou plutôt, la laissa tomber sur une table basse. C’était déjà beaucoup pour un adulte, mais trop pour un corps d’enfant. Alors qu’elle était secouée par des larmes qui montaient et n’arrivaient pas à être réfrénées, Langouste était apaisée. Souriait pour la première fois depuis qu’elle était arrivée dans ce monde. Elle prit son père dans ses bras. Maintenant, elle le savait, rien ne pouvait plus lui arriver.


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